La SABIX
Bulletins déja publiés
Sommaire du bulletin n. 3
 

HISTOIRE DE LA VIE ET DES FUREURS DE FRANÇOIS PEYRARD
bibliothécaire de l'Ecole polytechnique de 1795 à 1804
et traducteur renommé d'Euclide et d'Archimède.

par Janis LANGINS

Je tiens à remercier M. Emmanuel Grison qui a bien voulu revoir ce texte pour en améliorer le style et la langue.

En 1804, peu après que le Premier Consul se fût mué en Empereur et l'Ecole polytechnique en un internat militaire, Peyrard, son bibliothécaire depuis 1795, est sur le point d'être licencié. Les plaintes à propos de sa conduite et de ses colères s'amoncellent depuis plusieurs années, son indiscipline administrative est notoire. Bien qu'officiellement secrétaire du Conseil de l'Ecole (1), voilà un an qu'il néglige de remplir ces fonctions. Le nouveau gouverneur militaire de l'Ecole, le général Lacuée, est soucieux avant tout d'éviter qu'on ne parle chez l'Empereur de désordres à l'Ecole : il lui faut la paix chez les élèves, mais aussi parmi le personnel, ce qui l'amène à envisager de se séparer de trublions comme Peyrard.

Menacé de perdre un emploi bien rémunéré et un poste qui lui convient parfaitement - et où d'ailleurs il a bien réussi - Peyrard prend la plume pour se défendre : non seulement Lacuée lui a fait grief de sa carence dans ses fonctions de secrétaire, mais il a également fait état d'une "division intérieure" existant "entre plusieurs de [ses] collègues et [lui]".

Peyrard va s'expliquer par écrit, se disculper, mais aussi dénoncer : c'est l'administrateur de l'Ecole, Lermina, qui le poursuit depuis des années d'une haine tenace, et dont les calomnies, répandues dans toute l'Ecole, vont jusqu'à raconter que ce bibliothécaire distingué, traducteur d'Euclide, n'est rien moins que l'assassin de ses propres enfants ...

Le mémoire de Peyrard est daté du 1er vendémiaire an XIII (23 septembre 1804 ; le calendrier républicain était toujours officiellement en vigueur et le restera jusqu'au 31 décembre 1805). C'est un manuscrit autographe de 54 pages que conservent les archives de l'Ecole (2). Le style qui passe sans transition de l'exposé le plus neutre et le plus calme à la philippique la plus virulente contre l'ennemi, la violence de certaines expressions, l'amertume de bien des passages, tout cela traduit le trouble profond du rédacteur. De nombreuses phrases sont assez soigneusement biffées pour qu'on ne puisse deviner le texte initial : est-ce parce que Peyrard , perdant tout sang-froid, avait laissé aller sa plume jusqu'à ce qu'il en reprenne le contrôle ?

C'est une confession à la Jean-Jacques, en forme d'autobiographie, une apologie passionnée de sa conduite - qui n'est pas sans rappeler le délire de persécution du même Jean-Jacques - un curieux mélange de curriculum vitae avec l'énumération minutieuse des états de services, et de relation policière d'incidents infimes et exagérément grossis. Le tout soutenu par la dénonciation violente du calomniateur sournois et odieux.

Mais ce document nous apporte bien des aperçus sur l'époque et sur l'histoire intérieure de l'Ecole, et, bien sûr, sur la biographie et le caractère - si rocambolesque soit-il - de Peyrard, traducteur estimé d'Euclide et d'Archimède et fondateur (3) de la bibliothèque de l'Ecole dont il sut remarquablement constituer et enrichir le fonds auprès duquel, déjà, il savait attirer les chercheurs.

LES ANNEES DE JEUNESSE DE PEYRARD

Nous suivrons l'exposé autobiographique de Peyrard dont le but, en racontant sa vie, est de faire apparaître son caractère sous son vrai jour et de montrer ainsi l'inanité des calomnies qui l'accablent.

Il est né le 29 octobre 1759 à Vial (Département de la Haute-Loire) (4) dans le Velay, une contrée aussi volcanique que lui-même. Fils d'"un riche propriétaire" (5), il commence ses études "sous un maître très habile" à Monistrol-sur-Loire, siège d'un ancien château des évêques du Puy. C'est encore dans la ville du Puy qu'il a continué au collège ses humanités et sa philosophie et y achèvera ses études. A la fin de sa seconde année de philosophie, il perd successivement son père et sa mère, à quelques mois d'intervalle. L'héritage de son père échouant à son frère aîné, un oncle chanoine à Monistrol veut lui "résigner son canonicat et quelques bénéfices" mais Peyrard a déjà cette "aversion insurmontable pour la prêtrise" qu'il aura toute sa vie. Au contraire, écrit-il, "je brûlais d'envie de venir à Paris, pour perfectionner mes études". Il prend donc "la résolution désespérée" de s'enrôler dans les Gardes françaises non seulement contre l'avis de sa famille ("Tous mes parents pensaient comme mon oncle"), mais même malgré les réticences du recruteur et les conseils d'un officier de ce corps.

Arrivant à Paris comme militaire, Peyrard jouit de facilités étonnantes dans ce corps qui était connu pour le relâchement de sa discipline. Il découvre la population parisienne, qu'il retrouvera lors des premières journées de la Révolution.

Tout le temps que je servis aux Gardes françaises fut employé au perfectionnement de mes études : je suivis les Cours publics, je fréquentai les bibliothèques, je fus dirigé par des hommes de lettres et par des savants illustres, j'eus toujours l'amitié de mes camarades et l'estime de mes officiers, qui me permirent de me faire remplacer dans mon service et me dispensèrent même de porter l'uniforme de mon corps.

On voit déjà comme il insiste sur la douceur de son caractère , répondant à l'avance aux griefs de ceux qui en avaient une opinion diamétralement opposée.

Il quitte les Gardes françaises en 1785 en "achetant son congé" - preuve parmi d'autres qu'il n'était pas dénué de ressources, provenant probablement de son frère aîné au titre de revenus de son héritage. Il devient ensuite le précepteur du jeune Alexandre Brongniart (1770-1847), le futur minéralogiste, sur une recommandation très élogieuse de Mauduit, professeur au Collège Royal. Au bout de 18 mois il quitte Brongniart, "emportant son estime et amitié" , donne des leçons particulières de mathématiques et envisage de faire des cours publics de cette discipline (6). En 1787, il épouse Mademoiselle Binet, fille du "chef de la paneterie des Invalides".

LA REVOLUTION : LE GROUPE DES SAVANTS DE L'AN II

La carrière de Peyrard prend plus de relief avec la Révolution. Il prétend avoir rédigé (avec Monge et Camus) (7) les cahiers de l'Assemblée du Tiers-Etat siégeant à l'Abbaye de Saint-Germain-des-Prés. En 1792, il est nommé électeur, membre du Conseil du Département de Paris, et administrateur des contributions publiques (8). Membre des Jacobins, présenté par Condorcet et Mirabeau, il dit avoir quitté le club en 1791 après la scission des Feuillants - mais cette assertion semble un peu douteuse, étant donné la confiance dont il devait jouir pendant la Terreur auprès du Comité de Salut public (9).

C'est en 1793 que Peyrard jouera brièvement un rôle de première importance dans l'histoire de l'enseignement en France.

La disparition de Condorcet avait porté un coup d'arrêt aux discussions sur l'organisation de l'enseignement qu'avait entreprises le Comité d'Instruction publique de la Convention. L'attention de celle-ci d'ailleurs était accaparée entièrement par la situation militaire désastreuse du moment. L'ancien enseignement, cependant, était frappé d'asphyxie faute de moyens tant en hommes qu'en argent, et de plus il était complètement discrédité : il y avait grand risque de voir disparaître en France tout le système d'éducation. C'est alors que, dans cette conjoncture critique, le Département de Paris adopta une politique active, très probablement sous l'impulsion de savants politiquement influents comme Monge, Fourcroy et Hassenfratz, pour sauver la situation (10) et présenta à la Convention, le 15 septembre 1793, sous forme de pétition, un plan d'organisation scolaire. Il fut accepté sur-le-champ, mais dès le lendemain, la Convention se reprit et, sans annuler son décret, décida néanmoins de le suspendre et d'ajourner la discussion : certains députés s'élevaient vivement contre le projet où ils dénonçaient une manoeuvre pour faire passer subrepticement à la Convention un plan d'enseignement entaché d'élitisme (11). Pourtant le plan de Paris eut le mérite d'être le seul projet national (il ne s'appliquait pas uniquement au Département de Paris) d'enseignement général à plusieurs degrés voté à la Convention, car il faudra attendre le Directoire pour que soient promulguées les lois instituant les écoles centrales.

Voici ce qu'écrit Peyrard :

En 1793, le Département forma, sur ma proposition, une commission chargée de prendre connaissance de l'état de l'instruction publique, et de lui présenter un projet d'organisation.

M.M. Bertholet, D'Aubenton, Fourcroy, Garât, Halle, Lagrange, Leblond, Monge, Vandermonde étaient membres de cette commission.

Cette commission préserva l'instruction publique de la ruine totale. Nous lui devons la création des Ecoles centrales et la conservation du Collège de France. J'étais membre de cette commission qui me chargea, avec M.M. Lagrange et Monge, d'examiner les personnes qui se présenteraient pour remplir des chaires de mathématiques.

Pour que cette commission connût à peu près l'objet sur lequel elle avait à délibérer, je fis imprimer le projet d'instruction publique (12).

Si nous prenons à la lettre les assertions de Peyrard il apparaît que son rôle était bien celui d'un animateur et non pas d'un simple exécutant dans cette affaire. Il y était en bonne compagnie et l'on voit même Lagrange, - qui, sous la Terreur resta plutôt sur la réserve - collaborer avec Monge dans ce travail d'organisation de l'enseignement.

Si l'on en croit Palmer, le Projet d'Instruction publique imprimé par Peyrard, serait un document rédigé indépendamment des efforts des savants plus connus qui, de leur côté, s'inspiraient du travail d'Arbogast au Comité d'Instruction publique de la Convention. Mais le témoignage de Peyrard - même s'il est toujours suspect -, indique bien que les savants et le Département ont travaillé de concert dès le début. Il ne faut pas trop insister sur les origines académiques des uns et les origines artisanales des autres : Peyrard n'était pas un simple "arpenteur" (13) et n'oublions pas d'autre part que Monge ne dédaignait jamais les aspects technologiques de sa science.

En l'an II, on trouve également Peyrard commissaire chargé d'assister les représentants du peuple pour la vente du Garde-meuble ; il est aussi membre du jury chargé de l'examen des machines de guerre par le Comité de Salut public. Avec Monge et Berthollet il doit faire une série d'expériences au parc de Bercy sur la meilleure forme à donner aux projectiles. En vendémiaire an III (début octobre 1794) il est "agent-secrétaire" du représentant en mission Lemoine, qui visite les mines et les manufactures des armes de quatre départements méridionaux (14).

On voit que Peyrard est bien un membre à part entière du groupe de savants et de techniciens qui travaillent avec le Comité de Salut public et où sera prise une grande partie du personnel de l'Ecole polytechnique.

LA BIBLIOTHEQUE DE L'ECOLE POLYTECHNIQUE

En effet Peyrard ne tarde pas à entrer à l'Ecole. Le premier bibliothécaire de l'Ecole, Pierre Jacotot, ayant démissionné le 30 germinal an III (19 avril 1795) Peyrard est immédiatement nommé à sa place. En tant que bibliothécaire il est en même temps membre et secrétaire du Conseil d'Administration avec la responsabilité de rédiger ses procès-verbaux.

Il ne tardera pas à être inquiété : un mois après sa nomination éclate l'émeute jacobine de Prairial (19 mai 1795) suivie d'une répression énergique et d'une chasse générale aux anciens jacobins ou réputés tels. Les professeurs Monge, Hachette et Hassenfratz disparaissent de l'Ecole pendant quelques mois, et Peyrard, comme Fourier, est arrêté comme terroriste (15).

Il nous est impossible de juger de la sincérité de Peyrard quand il nie avoir "jamais persécuté ni accusé qui que ce soit, à cause de ses opinions, ou pour faits de la Révolution ...Le Sénateur Garat et plusieurs autres personnes bien connues" sont invoquées pour vérifier ce fait, car "ils m'ont vu verser des larmes de sang [sic] sur les crimes commis au nom de la liberté". Il n'empêche que c'est bien sa réputation politique qui avait attiré l'attention sur lui pendant la répression anti-jacobine de l'an III (16).

Revenu à l'Ecole, Peyrard y reprend ses fonctions de bibliothécaire, et ne manque pas de souligner, avec quelque exagération, qu'il y avait tout à faire :

A mon arrivée [à l'Ecole], tous les livres de la bibliothèque étaient contenus dans deux armoires et parmi ces livres se trouvaient ceux de l'Ecole de Mézières, qu'on fut obligé de rendre dans la suite. De sorte qu'il est vrai de dire que l'on n'avait pas encore le commencement de la bibliothèque qui existe aujourd'hui et qui renferme presque tous les bons livres anciens et modernes relatifs aux sciences et aux arts.

Il est exact qu'une grande partie des livres provenait de l'Ecole du Génie de Mézières et des dépôts de livres confisqués des émigrés et condamnés, et il est également exact qu'une certaine partie sera restituée à l'Ecole du Génie à Metz (qui succédait à celle de Mézières) ainsi qu'à quelques héritiers (17). Mais l'inventaire de la bibliothèque de l'Ecole dressé par Jacotot le 30 nivôse an III (19 janvier 1795) mentionne 564 volumes, et avant son départ, en avril, ce nombre avait à peu près doublé.

Reconnaissons cependant que c'est avec l'arrivée de Peyrard que la bibliothèque va se constituer vraiment. Selon Albert de Rochas, Peyrard "doit être considéré comme le véritable fondateur de ... [la] bibliothèque de l'Ecole polytechnique" (18). Continuant l'exploration des dépôts littéraires du gouvernement, Peyrard arrive à réunir plus de 3.400 volumes pendant la première année après son arrivée : en l'an IX (1800 - 1801) il dresse le premier catalogue de la bibliothèque avec 7.555 volumes, et de Rochas estime qu'il y en avait 10.000 quand il quitta ses fonctions.

Peyrard ne se limitait pas d'ailleurs aux ouvrages nécessaires aux cours de l'Ecole. Il voulait faire de la bibliothèque un lieu de recherche et de délassement intelligent, comme en témoigne a contrario cet arrêté du Comité d'Instruction publique de la Convention daté du 20 vendémiaire an IV (12 octobre 1795) :

Une lettre du Directeur de l'Ecole polytechnique de thermidor an IX (juillet-août 1801) demandant des livres pour la bibliothèque s'excusera encore que certains livres ne soient pas absolument nécessaires pour les élèves, mais expliquera que les professeurs et "autres savants" utilisent la bibliothèque pour leurs recherches. Et, de fait, nous verrons Fourier aller loger chez Peyrard à l'Ecole polytechnique en 1803 quand il aura "un travail qu'il doit faire près de la bibliothèque" : on voit par là que déjà la bibliothèque de l'Ecole polytechnique servait de lieu de recherches pour les savants (20).

Peyrard avait une autre fonction importante : celle de membre de la commission de rédaction du Journal de l'Ecole polytechnique. Le premier numéro portait la date de germinal an III (mars-avril 1795) (21), et une partie du revenu de la vente du journal était utilisée pour l'achat de nouveaux livres pour la bibliothèque. Peyrard assurait le gros du travail de la commission, mais c'était uniquement une tâche d'organisation et d'administration, car c'était le Conseil de l'Ecole, lors de ses réunions, qui approuvait ou rejetait les articles. Bien qu'après 1798 le Conseil ait abandonné ces décisions à la commission, on ne peut pas considérer que Peyrard ait jamais exercé la fonction d'un véritable rédacteur de revue au sens moderne du terme.

Peyrard ne se bornait pas à son travail de bibliothécaire. Il publia un livre, : De la Nature et de ses lois (Paris, 1793 - 1794), dans lequel il s'occupait du percement de l'isthme de Suez, et un Précis historique des principales descentes qui ont été faites dans la Grande-Bretagne depuis Jules César jusqu'à l'an V de la République (Paris, 1798). Il traduisit et commenta les ouvrages suivants : Poésies complètes d'Horace (Paris, 1803) ; De la supériorité de la femme au-dessus de l'homme et Traité de l'incertitude des sciences de C. Agrippa (Paris, 1803) (22).

Mais son oeuvre la plus importante au point de vue de l'histoire des sciences - ses traductions, toujours valables, d'Archimède et Euclide - ne sera achevée que vers la fin de son séjour à l'Ecole polytechnique ou après son départ. C'est Peyrard qui avait identifié dans le butin que Napoléon ramenait du Vatican le manuscrit d'Euclide connu sous le nom de "Vaticanus graecus 190", version la plus ancienne du célèbre géomètre grec (23). Doté d'une culture classique remarquable et de connaissances mathématiques non négligeables où transparaît un sens excellent des développements mathématiques contemporains, Peyrard était la personne idéale - et peut être unique - pour faire ces traductions. Il avait d'ailleurs fait auparavant la preuve de sa culture mathématique en faisant une réédition du Cours de mathématiques de Bézout, parue en 1798 et dont les réimpressions se suivront jusqu'en 1833 (24).

UN CARACTERE EMPORTE : DISPUTES, VIOLENCE ET VOIES DE FAIT

Le séjour de Peyrard à l'Ecole polytechnique fut loin d'être aussi paisible que le laisserait supposer le récit de toute cette activité intellectuelle .

Ses déboires commencent, nous dit-il, avec l'arrivée à l'Ecole, peu de temps après lui, de Claude Lermina (1749 ? - 1806) nommé administrateur de l'Ecole (25). Tout le mémoire de Peyrard que nous présentons ici est imprégné d'une haine farouche contre Lermina qui, selon lui, " n'a cessé de me contrarier, de me persécuter, de me calomnier et de chercher par tous les moyens possibles, à me faire perdre ma place".

Son animosité contre Lermina est telle que, oubliant dans les dernières pages de son mémoire que celui-ci est rédigé à l'adresse de Lacuée, il commence à apostropher Lermina :

" Aves-vous donc oublié, M. Lermina, que pendant tous les temps que vous n'aves pas régné à l'Ecole par la terreur, vous aves été l'objet des huées et des imprécations générales ?

Aves-vous oublié (la scène extrêment désagréable au bureau de l'Ecole) ... avec M. Guyton qui vous avait surpris déclamant contre lui devant des Elèves ?

Aves-vous oublié vos disputes, vos querelles sans nombre, soit dans le sein de l'Ecole, soit dans le sein du Conseil, avec MM. Gasser, Laurent, Le Camus, Neveu, Gayvernon, Guyton, etc ..."

Nous citons cette tirade, qui finit par "Je ne suis point un hypocrite, un menteur, un fourbe, un lâche calomniateur " et autres invectives de même genre dirigées contre Lermina, pour donner une idée de la fureur de Peyrard et du ton du mémoire en général.

Quelles sont les origines de cette antipathie ? Il semble bien qu'une des raisons ait été la réduction du salaire de Peyrard par Lermina, de 6.000 francs par an (celle d'un professeur titulaire à l'Ecole) à 3.000 francs (26). C'était non seulement un coup dur au point de vue financier, mais aussi une perte de prestige par rapport aux autres professeurs et à Lermina qui lui-même touchait 6.000 francs.

Pour un homme aussi ombrageux que Peyrard c'était une situation qu'il ne pouvait supporter. Il s'adressa directement au Ministre de l'Intérieur, François de Neufchâteau, lequel sans même consulter le Conseil de l'Ecole, le nomma le 15 pluviôse an VII (3 février 1799) "Professeur de Bibliographie" à l'Ecole. Peyrard prétend dans son mémoire que cette action du Ministre était destinée seulement à lui rendre son salaire par une fiction administrative et n'impliquait nullement l'établissement de ce nouveau cours au titre bizarre dans l'Ecole. Mais le Conseil de l'Ecole ne l'entendit pas de la sorte et réagit de façon extrêmement énergique. Il chargea Chaussier, Prony et Gayvernon de faire des représentations directement au Ministre, et celui-ci semble avoir retiré sa nomination car on n'entendit plus parler de cette affaire (27). L'inquiétude du Conseil n'est pas difficile à comprendre : aux yeux des professeurs l'action du Ministre menaçait l'indépendance toujours fragile du Conseil et risquait d'ouvrir le champ à toutes sortes d'expérimentations pédagogiques par des bureaucrates étrangers à l'Ecole. De plus, le fait qu'un agent de l'Ecole ait fait appel directement à l'autorité supérieure ne put manquer de choquer leurs sentiments de bienséance.

Episode qui montre que Peyrard était capable de passer par-dessus la tête de ses collègues: il le fera plus tard de nouveau en s'adressant directement à Fourcroy, Directeur de l'Instruction publique, à propos de plaintes selon lesquelles il aurait prêté des livres sans autorisation. Ceci montre en tout cas que la perte de son crédit personnel auprès des membres du Conseil ne fut pas entièrement du fait de Lermina.

Notons d'autre part que Peyrard n'hésite pas à rappeler à Lacuée qu'en ventôse en VIII (février - mars 1800) Lermina aurait été destitué et condamné à rendre 22.000 francs à la caisse de l'Ecole - incident dont on n'a aucune relation officielle (28).

Le caractère et la vie privée de Peyrard ne font qu'aggraver la situation. Sa vie familiale est devenue difficile (là aussi Lermina est mis en cause) et les altercations bruyantes avec sa femme sont connues de toute l'Ecole (29). Au printemps 1802, sa fille de onze ans s'était enfuie de leur domicile ; son fils âgé de 4 ans, laissé seul à la maison, tombé de la fenêtre, s'était cassé la cuisse : les mauvaises langues (toujours inspirées par Lermina, selon Peyrard) parlent d'assassinat.

Il vit assez ouvertement avec sa maîtresse et va divorcer au printemps suivant. Déjà Peyrard a été apostrophé au Conseil par Guyton de Morveau, le directeur de l'Ecole, comme étant "le scandale de la maison" et le 19 messidor an XI (8 juillet 1803) il est chassé de son appartement de l'Ecole pour manque de "bienséances sociales". Les rixes de Peyrard avec les élèves, les garçons de salle, et même avec un ouvrier vitrier à la porte de l'Ecole sont racontées en détail dans son mémoire mais n'ajoutent pas grand chose au portrait d'un personnage dont Rochas d'Aiglun disait que "ses moeurs étaient plus faciles que son caractère ...".

LE TRADUCTEUR D'EUCLIDE ET D'ARCHIMEDE

Aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est pendant cette période orageuse que Peyrard accomplit l'oeuvre sur laquelle se fonde encore sa réputation : les traductions des grands mathématiciens grecs. En 1804 sortit à Paris la traduction des Eléments de géométrie d'Euclide. Elle reçut l'approbation de l'Institut et fut adoptée officiellement pour les bibliothèques des lycées impériaux. Delambre lut les épreuves et les compara au texte grec. Trois ans plus tard vinrent Les Oeuvres d'Archimède et entre 1814 et 1818 parurent Les Oeuvres d'Euclide en grec, en latin et en français d'après un manuscrit très ancien qui était resté inconnu jusqu'à nos jours (30). Bien que la traduction d'Archimède par Peyrard soit maintenant dépassée à la suite des travaux de Heiberg, sa traduction d'Euclide est encore considérée aujourd'hui comme assez fiable pour mériter une réimpression (31).

Le procès-verbal du Conseil de l'Ecole du 19 prairial an XII (8 juin 1804) - c'est-à-dire après le départ de Peyrard de son appartement à l'Ecole mais avant son licenciement - contient le passage suivant :

Le Conseil désigna une commission pour examiner les conditions d'une telle entreprise : Monge, Prony, Lacroix, Labbey, Hachette,Poisson et Lermina y furent nommés. Que de grands mathématiciens - et grands professeurs - comme Monge, Lacroix et autres aient manifesté ainsi leur intérêt pour la traduction et la publication des classiques des mathématiques, voilà qui n'a rien de bien surprenant. Mais, selon Peyrard, il ne s'agirait en fait que d'une intrigue de Lermina pour empêcher que le Conseil souscrive à la traduction d'Archimède qu'il était en train de faire et à laquelle Monge et Prony avaient déjà souscrit à titre personnel. Peyrard prétend qu'il n'y avait en fait qu'une seule personne au Conseil - lui-même - qui avait à la fois les connaissances des mathématiques et du grec nécessaires pour s'attaquer à ce travail énorme qu'il estimait devoir occuper jusqu'à douze volumes in-folio. De fait, on trouve encore une mention au procès-verbal, un mois plus tard, approuvant de nouveau l'idée des traductions et demandant des suggestions pour les ouvrages à traduire, puis on n'entend plus parler du projet. Il faut donc attribuer à Peyrard - et à lui seul - la gloire d'avoir fait les premières traductions françaises valables d'Archimède et d'Euclide.

 

EPILOGUE

La tentative de Peyrard d'obtenir la mansuétude de Lacuée n'aboutit pas : il est probable que la religion du gouverneur de l'Ecole était déjà éclairée. Peyrard fut licencié à dater du 1er frimaire an XIII (22 novembre 1804).

Bien entendu il n'y a que très peu de pièces au dossier d'archives de Peyrard le concernant après son licenciement. Plusieurs demandes d'indemnité, restées insatisfaites, pour le travail d'établissement du catalogue de la bibliothèque (continué 7 mois après son départ officiel, selon lui) montrent une ténacité qui, chez lui, ne saurait surprendre. Le fait que Monge appuya une de ces demandes auprès de Lacuée indique que Peyrard avait conservé au moins quelques amis influents et c'est peut-être grâce à eux qu'il obtint des postes divers qui lui permirent de subsister : en 1806 il est professeur de mathématiques et d'astronomie au Lycée Bonaparte (aujourd'hui lycée Condorcet). Mais son caractère l'empêcha sans doute de garder ce poste bien longtemps, car on trouve dans son dossier une dernière lettre de lui au secrétaire de Lacuée en 1810, dans laquelle il a le titre de Chef de Bureau du Service de l'Artillerie, 6e division du Ministère de Guerre (32). En 1814 l'Ecole polytechnique réclamait deux exemplaires de l'Euclide de Peyrard, payés depuis plusieurs années et jamais livrés ...

Sa mort à l'hôpital Saint-Louis le 3 novembre 1822 nous laisse supposer qu'il finit dans la misère.


(1) Il s'agit du premier Conseil de l'Ecole, institué par l'arrêté du 6 frimaire an III (26 novembre 1794). La loi du 25 frimaire an VIII (16 décembre 1799) en avait fait le "Conseil d'Instruction et d'Administration" et avait créé, au-dessus de lui, le Conseil de Perfectionnement, dont le secrétaire n'était autre que ... Lermina.

(2) MS "Mémoire de M. Peyrard, bibliothécaire de l'Ecole polytechnique", cote X2b 223, Arch. E. P. VI. 1. a. carton 1 (1794 -1815). Une main d'archiviste a écrit en tête du manuscrit "1er ventôse an XIII" ; Peyrard ayant daté, de sa main, "1er Vre an XIII", il s'agit certainement d'une erreur de lecture, car le 1er ventôse, Peyrard avait été destitué depuis trois mois et le contexte exclut cette rédaction tardive.

(3) Le poste de "conservateur de la bibliothèque", créé par l'arrêté d'organisation du 6 frimaire an III (26 novembre 1794) fut confié d'abord à Pierre Jacotot (1755 - 1821) qui, à l'époque, participait à l'instruction des chefs de brigade. Jacotot démissionna des le 30 germinal an III (19 avril 1795) et Peyrard fut nommé le 6 floréal (25 avril).

(4) Rochas d'Aiglun a donc raison quand il date "vers 1760" la naissance de Peyrard. Voir ses remarques biographiques sur Peyrard dans : Albert de Rochas, "Notice historique sur la bibliothèque de l'Ecole polytechnique" in 1er supplément décennal au Catalogue de la bibliothèque de l'Ecole polytechnique, Paris, 1892.

(5) Toutes les citations extraites du manuscrit de Peyrard figurent en italique dans le présent texte.

(6) Peyrard s'exprime un peu vaguement et il est possible qu'il ait effectivement fait de tels cours publics.

(7) Il s'agit très probablement d'Armand-Gaston Camus (1740 - 1804), érudit et membre de l'Académie des Inscriptions et Belles lettres (plus tard de l'Institut), député du Tiers Etat à la Constituante, conventionnel, et plus tard archiviste de la République.

(8) Ces assertions de Peyrard sont confirmées par Sigismond Lacroix. Le Département de Paris et de la Seine pendant la Révolution, Paris, 1904.

(9) Sa présence aux Jacobins - mais non son départ - est confirmée par Alphonse Aulard. La Société des Jacobins, 6 vol., Paris, 1889 - 1897.

(10) Cet épisode a attiré avec raison l'attention des historiens depuis Guillaume jusqu'à Palmer qui y voient une tentative de réaliser les idées de Condorcet sur l'enseignement en y ajoutant une forte dose d'enseignement pratique à l'intention des sans-culottes.
James Guillaume, éd., Procès-verbaux du Comité d'Instruction Publique de la Convention nationale, 6 vol., Paris, 1891 - 1907, t. 4 et R.R. Palmer, The Improvement of Humanity : Education and the French Révolution, Princeton, 1985, pp. 160 - 170.

(11) Le débat n'est pas clos sur ce point. Bien que Palmer considère le plan du Département de Paris comme un effort sincère de démocratisation, on ne peut oublier que les conventionnels Coupé de l'Oise, Chabot, Fabre d'Eglantine, et Cambon estimaient que ce n'était qu'un plan pour "créer une nouvelle aristocratie", "une aristocratie des savants", qui "reproduit les académies sous un autre nom" (cités par Guillaume, t. 2, pp. 404 - 408 et 414 - 417). Peut-être faudrait-il même rejeter la dichotomie un peu simpliste et usée entre "démocrates" et "élitistes" et prendre un nouveau cadre de référence ?

(12) C'est sans doute le Projet d'Instruction publique pour le Département de Paris, par Peyrard, administrateur du Département et membre de la Commission d'Instruction publique, Paris, s.d. [1793].

(13) Palmer fait erreur (p. 164) en croyant que Peyrard, désigné comme "géomètre", était un arpenteur ("surveyor"). Le sens du mot "géomètre" est bien, dans le cas de Peyrard, le sens de mathématicien.

(14) Il s'agit de Jean-Claude Lemoyne-Vernon (1749 -1812), "Homme très commun, mais d'un caractère assez bon ; son secrétaire Peyrard faisait tout, pendant que le représentant fumait sa pipe et buvait son eau-de-vie à plein gobelet" selon un témoignage contemporain cité par A. Kuscinski, Dictionnaire des conventionnels, Paris, 1917, p. 399.

(15) Il dit avoir été arrêté à Port Libre. Selon Figuères, Les noms révolutionnaires des Communes de France, 1901, il s'agit de la commune de Gironde dans le canton de La Réole (Gironde).

(16) Dans l'article biographique écrit par Fayolle (est-ce le Fayolle qui était un des premiers chefs de la brigade de l'Ecole centrale des travaux publics en 1794 ?) dans J.-F. et L.-G. Michaud, éds., Biographie universelle, ancienne et moderne ..., 2e éd. Paris, 1854 - 1865, on peut lire que Peyrard était "lié avec les plus ardents révolutionnaires ; il contribua, ainsi qu'Anacharsis Cloots et plusieurs autres, à la démarche que Gobel, évêque constitutionnel de Paris, fit à la Convention nationale, où, le 7 novembre 1793, il abjura scandaleusement ses fonctions ecclésiastiques. Ami intime de Sylvain Maréchal, Peyrard lui fournit des notes pour son Dictionnaire des athées ...".

(17) Un arrêté du Directoire du 4 prairial an IV (23 mai 1797) ordonna le retour des objets (y compris sans doute les livres) qui avaient été envoyés de Mézières lors de la fondation de l'Ecole centrale des travaux publics. La direction de l'Ecole polytechnique résista (probablement avec un certain succès) à cet ordre. Elle résista aussi aux réclamations de certains particuliers qui demandaient le retour d'objets confisqués. Ainsi le 8 fructidor an III (25 août 1795) le procès-verbal du Conseil indique que le Comité d'Instruction publique de la Convention a autorisé un certain citoyen à reprendre deux volumes d'estampes après que le Conseil eût exigé une telle autorisation pour toute restitution.

(18) Les renseignements qui suivent sont tirés de Rochas d'Aiglun, lui-même bibliothécaire de l'Ecole au 19e siècle cf note (4) ci-dessus.

(19) Guillaume, t. 6, p. 769.

(20) Citation extraite d'une lettre de Peyrard demandant l'augmentation de son logement, le 7 ventôse an XI (26 février 1803). Dossier Peyrard, Arch. E.P. Depuis le 2 janvier 1802, Fourier est préfet du Département de l'Isère.

(21) Il semble bien, d'après le procès-verbal du Conseil de l'Ecole centrale des travaux publics du 28 thermidor an III (15 août 1795) que ce numéro ne soit sorti qu'en août 1795.

(22) Rochas d'Aiglun,p. VIII

(23) Art. "Euclid" dans C.C. Gillispie, éd., Dictionary of scientific Biography, 16 vol., New-York, 1970 - 1980. Ce manuscrit sert toujours de base aux traductions définitives d'Euclide. Avant Peyrard, Euclide n'était connu que d'après la version éditée par Théon d'Alexandrie au 4e siècle de notre ère.

(24) Selon le catalogue de la Bibliothèque nationale. Le Cours de mathématiques à l'usage des élèves d'artillerie et de la marine de Bézout, paru pour la première fois entre 1764 à 1769, eut un succès qui se maintint durant presque un siècle et ne fut atteint ni par les révolutions politiques, ni même par la fondation de l'Ecole polytechnique. Voir Jean Dhombres, "French Mathematical Textbooks from Bézout to Cauchy", Historia Scientiarum, 28 (1985), 91 - 137.

(25) Voir dans le Journal de l'Ecole polytechnique, t.6 (cahier 13 : avril 1806), p. 376 une courte notice nécrologique de Lermina (mort en fonctions le 22 janvier 1806, quelques mois à peine après le départ de Peyrard) par Sganzin et Hachette, lue à la séance du Conseil d'Instruction du 14 mars 1806. On y apprend qu'avant de venir à l'Ecole polytechnique, Lermina travailla dans l'administration des finances du département de la Guerre et fut pendant trois ans commissaire de la trésorerie. Il s'intéressait à l'histoire naturelle, notamment à la botanique et à la minéralogie, ce qui le mit en relation avec Romé de l'Isle. Il a publié dans le Journal de l'Ecole polytechnique (t. 2, cahier 6, thermidor an VII) un article intitulé "Description d'une pierre appelée Sibérite" et suivi de "l'analyse de ladite pierre par les citoyens Garin et Pécheur, élèves de l'Ecole polytechnique" (de la promotion 1796).

(26) C'est la version de Peyrard. Il faudrait vérifier cela dans les archives. Quelqu'un a mis en marge de l'affirmation de Peyrard le mot "hic !" - ce qui rend possible des doutes. Peyrard fait également allusion, dans notre manuscrit, à un article anonyme, aussi violent qu'insultant, d'inspiration antijacobine, dirigé contre Lermina et publié dans "Le Républicain Français" du 6 frimaire an V (26 novembre 1796). Peyrard se défend d'avoir été l'auteur de cet article qu'il dit avoir été écrit par Garnier.

(27) Arch. E.P., Procès-verbaux du Conseil du 18 pluviôse an VII (6 février 1799).

(28) Il n'y a aucune trace de cette prétendue destitution dans les archives de l'Ecole. Il est pourtant possible qu'un ordre de reversement ait été lancé parce que pendant l'année précédente le Conseil avait autorisé Lermina à utiliser les fonds de l'Ecole pour acheter des remplaçants pour les nombreux élèves touchés par la loi très rigoureuse de 1799 sur la conscription. Voir les Procès-verbaux du Conseil du 22 floréal an 7 (11 mai 1799) où l'action de Lermina est appuyée unanimement par le Conseil.

(29) Voir la reproduction en fac-similé du rapport daté du 19 pluviôse an XI (8 février 1803), que fait Lermina à Guyton d'un de ces incidents. Le style n'est pas sans révéler quelque peu le genre de ce personnage qui était la bête noire de Peyrard.

(30) Voir le rapport élogieux de Lagrange et Delambre sur l'Archimède de Peyrard (lu à l'Institut le 22 septembre 1806) qui suit la dédicace à Napoléon imprimée dans ce livre.

(31) La librairie A. Blanchard a réédité la traduction d'Euclide de Peyrard en 1966 avec une introduction de Jean Itard qui signale certaines obscurités et lacunes de la traduction de Peyrard.

(32) Selon sa notice biographique dans Michaud, "en 1806, il entra comme professeur de mathématiques spéciales, au lycée Bonaparte, place qu'il occupa pendant dix ans". Selon J. Itard, il est signalé au Lycée Bonaparte en 1810, et la lettre au secrétaire de Lacuée est du 9 février 1810. Il est donc fort possible que les renseignements de Michaud soient erronés et que Peyrard n'ait gardé son poste que jusqu'en 1810. La notice biographique sur Peyrard dans F. Hoefer, Nouvelle biographie générale, Paris, 1862 semble moins fiable encore que celle de Michaud car on y fait mention de certaines missions officielles pendant l'Empire qui ne sont pas spécifiées et pour lesquelles il n'y a aucune confirmation.

C'est Itard, dans son introduction à la réimpression de 1966 de l'Euclide de Peyrard, citant encore l'historien non spécifié du Lycée Bonaparte, qui signale "une vive querelle avec M. Poisson, haut fonctionnaire de l'Instruction publique, [qui] le fit regarder à l'Université comme un mauvais coucheur".