« La chimie doit être le flambeau qui éclaire la médecine ». C'est ce qu'écrivait Berthollet en 1779. A cette époque, on était aux débuts de la chimie qui remplaçait l'Alchimie. Elle allait devenir, au cours du XIXème siècle, la « chimie triomphante ». Mais à l'époque de Berthollet on ne parlait pas encore de Biologie comme on en parla à la fin du XIXeme siècle. Et pour cause, on en était encore au ... phlogistique, à la génération spontanée, etc. Il faudra attendre les Pasteur, Koch, Kitasato et tant d'autres pour que ces théories soient mises à terre.
Mais la justesse de vue de Berthollet est étonnante. En effet, qu'observe-t-on deux siècles plus tard, au début du IIIème millénaire (après Jésus Christ) ?
Il ne se passe pas de semaine sans que la structure d'une macromolécule biologique, souvent en interaction avec un ligand, ne soit dévoilée : souvent par analyse cristallographique (Rayons X, diffraction électronique, etc.) ou par Résonance magnétique nucléaire.
Et alors commence une aventure nouvelle : si la résolution est suffisante on peut voir le type d'interaction du ligand avec son site de fixation (souvent, un récepteur). On peut décrire cette interaction en termes de structure chimique et en déduire le mécanisme d'action. Il en a été ainsi, récemment, pour deux situations importantes :
- la révélation de tout ou partie du mode d'action des importants médicaments antitumoraux du groupe du TAXOL®, préparés à partir de l'if. On savait, depuis 1979, que le TAXOL® agissait sur la tubuline, protéine ubiquiste, constitutive du fuseau que l'on voit apparaître au cours de la division cellulaire et qui sert, entre autres, à orienter et à répartir les chromosomes dans les deux cellules-filles résultant de cette division. Mais on vient récemment de découvrir que le TAXOL® et les produits voisins comme le TAXOTERE®, réagissaient, aussi, avec une protéine qui joue un rôle important dans la vie ou la mort de la cellule.
J'ai, volontairement, pris ces exemples dans le domaine de la médecine pour montrer le caractère prémonitoire de la citation de Berthollet.
« La chimie est à la biologie (et à la médecine) ce que le solfège est à la musique » ai-je coutume de dire. Mais Berthollet avait beaucoup plus de mérite que moi en prévoyant, il y a deux siècles !, le rôle très important que jouerait la chimie dans le développement de la Médecine et de la Biologie.
Pasteur, chimiste, en a fait, quelques années plus tard, une démonstration éclatante et tant d'autres après lui. Et il y en aura davantage encore au cours du siècle qui commence.