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Bulletin n° 66

Maurice Allais (1911-2010, X1931)
Toujours méconnu ?

Ce numéro comporte 215 pages.

Contenu du numéro :

  • Editorial :
    par Pierre Couveinhes

  • Quelques repères biographiques : le parcours singulier d'une personnalité hors normes
    par Christine Allais

  • La philosophie de ma vie
    par Maurice Allais

  • Un voyage d'études aux États-Unis en 1933, à l'origine de la vocation d'économiste de Maurice Allais
    par Christine Allais

  • Bibliographie thématique
    par Christine Allais

  • Vingt ans après : Maurice Allais, toujours méconnu
    par Thierry de Montbrial

  • Maurice Allais, libéral ou socialiste? Libéral et socialiste?
    par Bertrand Munier

  • ...et le prix Nobel d'économie 1988 fut attribué à Maurice Allais
    par Bertrand Munier

  • L'apport de Maurice Allais à l'économie des transports et aux principes de tarification
    par Alain Bonnafous

  • Le paradoxe d'Allais : une notoriété aussi universelle que justifiée
    par Eric Barthalon

  • Maurice Allais et la dynamique des crises
    par Jean-Jacques Durand

  • La mondialisation des échanges, mythologies et réalité
    par Maurice Allais

  • Maurice Allais, professeur à l'École des mines de Paris
    par Hubert Lévy-Lambert

  • Maurice Allais, professeur à Nanterre
    par Georges Prat

  • Maurice Allais, physicien
    par Jean-Bernard Deloly

  • Maurice Allais au risque du XXIe siècle
    par Bertrand Munier et Jean-Claude Trichet

  • Biographies des auteurs


Ce bulletin a été coordonné par Christine Allais.

Editorial
Maurice ALLAIS (1911-2010, X 1931). Toujours méconnu?

Pierre Couveinhes


Le titre de ce bulletin reprend celui de l'article de Thierry de Montbrial que l'on trouvera dans ce numéro. Méconnu, Maurice Allais l'est à plusieurs titres. Bien sûr, sa qualité de « premier prix Nobel français d'économie » lui donne une grande notoriété, mais l'homme, ses idées et son oeuvre, sont-ils si bien connus ? Certains voient en lui un libéral, voire un ultra-libéral, alors que nul plus que lui n'était attaché à la justice sociale. Beaucoup le considèrent, à juste titre, comme un des fondateurs de l'usage des mathématiques en économie, mais le chargent volontiers des excès que cela a pu entraîner. Or Allais a été le premier à s'élever contre l'abus du formalisme mathématique. N'a-t-il pas écrit: « Je ne puis ici que me ranger à l'opinion de Schumpeter. Si pour la compréhension de l'économie il y avait à choisir entre la maîtrise de l'histoire économique et la maîtrise des mathématiques et de la statistique; c'est la première incontestablement qu'il faudrait choisir ».

Et n'oublions pas que la partie la plus connue de son oeuvre, le fameux paradoxe d'Allais « à la notoriété aussi universelle que justifiée », comme l'écrit Éric Barthalon peut être considéré comme l'acte fondateur de l'usage en économie des méthodes de la psychologie.

En vérité, Maurice Allais est avant tout un esprit libre qui ne se laisse pas enfermer dans des cases. Il écrit : « En ce qui nous concerne nous préférons rester seuls, ou presque, dans des convictions que nous considérons comme seules vraies, plutôt que de nous associer à des doctrines toute faites, que nous ne pouvons, d'un côté comme de l'autre, ni accepter, ni rejeter en bloc ». Ce n'était certes pas un homme de coteries et de renvois d'ascenseur ! Inutile de préciser qu'une telle intransigeance a conduit à une reconnaissance tardive.

Une partie de l'oeuvre d'Allais est aujourd'hui partie intégrante de la discipline économique, en particulier sa théorie de l'équilibre général, mais une part importante reste aujourd'hui méconnue, même des spécialistes. C'est par exemple le cas de sa théorie « héréditaire, relativiste et logistique » de la demande de monnaie, où il introduit la notion de « temps psychologique ». Avec ses capacités intellectuelles hors du commun et sa vaste culture, Maurice Allais naviguait avec aisance dans des formalismes mathématiques complexes et savait en voir les limites pour faire appel à d'autres disciplines, psychologie, sociologie voire histoire. Peu de personnes en sont capables.

En outre, Maurice Allais a été un grand professeur et a eu de nombreux disciples, souvent brillants, mais il n'a jamais su ou voulu constituer une école de recherche qui aurait explicité, développé et fait connaître ses thèses. On peut le regretter.

Ce bulletin que Christine Allais, fille unique de l'illustre économiste, a accepté de coordonner voudrait contribuer à mieux faire connaître l'homme et son oeuvre.

Le numéro s'ouvre par des éléments biographiques, où l'on voit l'enfant issu d'un milieu modeste, très tôt orphelin de père, s'élever progressivement, entrer à l'Ecole polytechnique, dont il sort major, dédier sa vie à la recherche et l'enseignement avant d'atteindre les plus grands honneurs dans ses dernières années, devenant prix Nobel d'économie et académicien. Cette destinée exemplaire suscite la nostalgie d'une époque où l'ascenseur social semblait bien fonctionner, où le corps enseignant savait déceler très tôt les élèves doués issus de milieux modestes, même au coeur de la France profonde, pour les amener via l'École polytechnique aux plus hautes responsabilités, qu'il s'agisse du domaine académique, comme pour Maurice Allais, ou du monde des affaires, comme pour Georges Besse. Notre pays semble hélas avoir perdu la recette...

Cette biographie est complétée par un texte écrit par Maurice Allais lui-même, intitulé « La philosophie de ma vie », qu'il conclut en décrivant ce qui a été le moteur de son existence : « Quels qu'aient été ses domaines d'intérêt, ma vie entière a été dominée par la soif de connaître; par la passion de la recherche. Cette passion, je l'ai ressentie dès ma première jeunesse; elle a constitué le fondement même de toute mon existence, et sans doute l'éprouverai-je jusqu'à ma mort ».

Mais cette passion suffit-elle à tout expliquer ? Sans nul doute, il s'y ajoute un autre facteur qu'il faut bien qualifier de génie: comment comprendre autrement qu'Allais ait pu écrire en seulement deux années, en plus de ses activités d'« ingénieur des mines ordinaire », les mille pages de son Traité d'Économie Pure, jetant les bases de l'économie mathématique - et ce alors que sa connaissance de la discipline se limitait à la lecture de quelques (bons) auteurs... Des livres « rédigés pour l'essentiel en autodidacte » écrit Georges Prat qui conclut: « c'est là pratiquement un prodige. » Maurice Allais en semblait lui-même surpris : « Là a commencé une période de ma vie qui aujourd'hui encore me paraît presque incompréhensible. (...) Comment m'a-t-il été possible de rédiger un tel ouvrage dans un délai aussi court, et cela dans les conditions si difficiles des années noires de la guerre et de l'occupation allemande en France ? ».

Mais pourquoi l'économie? Allais attribue ce choix, très original à l'époque, à un voyage d'études aux États-Unis à l'été 1933, à l'époque de la Grande Dépression. Christine Allais a retrouvé le journal de voyage rédigé par son père, que celui-ci croyait avoir égaré. De larges extraits en sont publiés dans ce bulletin, qui fournissent de précieuses informations sur le caractère du grand économiste. Tout en restant synthétique, le journal, présenté sous la forme de questions-réponses, aborde des questions extrêmement variées, témoignant d'un sens du concret et d'une ouverture d'esprit remarquables: rien n'échappe à l'observation d'Allais, qu'il s'agisse de la qualité des moyens de transport, des ascenseurs ou de celle des salles de bains des hôtels. Mais beaucoup plus que sur les aspects industriels ou techniques, son attention se porte sur les aspects psychologiques et sociologiques. Il est très choqué à l'évidence par les conséquences de la crise de 1929. Il note : « Le luxe côtoie partout la misère et des rues de taudis se trouvent à deux pas de quartiers de millionnaires ». Et plus loin: « Pour ce qui est de la crise; les Américains en souffrent terriblement » Beaucoup plus tard, il fera figurer dans les facteurs principaux de sa vocation d'économiste « le caractère intellectuellement choquant et socialement dramatique de la Grande Dépression ».

Cependant, l'économie stricto sensu n'a jamais été le seul centre d'intérêt de Maurice Allais, comme en témoigne la « Bibliographie thématique » établie par Christine Allais, dont l'ampleur et la diversité impressionnent.

L'article suivant a été rédigé par Thierry de Montbrial, qui fut d'abord l'élève de Maurice Allais, avant de jouer un rôle important, avec quelques autres, pour que son oeuvre soit reconnue et distinguée, d'abord par la médaille d'or du CNRS, puis par le prix Nobel d'économie. Soulignant l'envergure et la variété de cette oeuvre, il en présente une synthèse, relevant que plusieurs découvertes d'Allais sont encore aujourd'hui attribuées à d'autres, notamment dans le monde anglo-saxon. Il rappelle que Paul Samuelson, autre prix Nobel d'économie, lui avait indiqué que « si Allais avait publié en anglais et s'il s'était fait connaître en anglais, il aurait vécu une toute autre carrière ». Cela est probable, mais Georges Prat estime que l'attribution du prix Nobel à Allais avait peut-être moins surpris aux États-Unis qu'en France, où il était un peu tenu à l'écart du monde universitaire car considéré comme un « libéral »...

Mais libéral, l'était-il vraiment, ou plutôt socialiste, ou peut-être « en même temps » les deux, comme l'analyse Bertrand Munier dans un fort intéressant article? Là encore, Maurice Allais échappe à toutes les classifications. Certes, il est viscéralement attaché à la liberté et a été en son temps un des très rares intellectuels français à avoir critiqué le fonctionnement de l'Union soviétique. Mais il est loin d'être un ultralibéral : opposé à tout « laisser-fairisme », il prône une intervention forte de l'État pour contrôler le fonctionnement des marchés et éviter qu'il ait des conséquences sociales inacceptables. Allais n'a jamais oublié ses origines modestes et a toujours été soucieux du sort des humbles. Son premier livre commence par cette phrase : « Alors que tant de pauvres gens souffraient de la faim, on a vu, dans ces dernières années, donner du blé à des porcs... ». Bertrand Munier conclut: « Maurice Allais est un économiste libre, dont seule la réflexion scientifique, au-delà de l'équation personnelle, explique les choix. Un véritable économiste ne commence pas par choisir une étiquette idéologique. La leçon de vie que Maurice Allais nous a donnée mériterait d'être davantage enseignée et répandue ».

Les cinq articles suivants sont consacrés aux principales parties de l'oeuvre économique d'Allais. Bertrand Munier présente tout d'abord celle qui a été distinguée par le prix Nobel : celui-ci fait référence à ses deux premiers livres, À la recherche d'une discipline économique (1943) et Économie et Intérêt (1947), qui incluent des découvertes faisant partie aujourd'hui de l'état de l'art de la théorie économique, notamment la théorie de l'équilibre et de l'optimum.

L'article suivant, écrit par Alain Bonnafous, concerne ce qu'Allais nommait « l'économie appliquée », dans le cas particulier des transports, avec de larges développements sur l'apport de Marcel Boiteux, qui sut utiliser systématiquement les principes d'Allais dans le cas de l'électricité. On se plait parfois à espérer le retour de quelques économistes de cette trempe pour mettre un peu d'ordre dans la tarification des services publics...

Eric Barthalon présente ensuite le fameux « paradoxe d'Allais », qui est sa découverte la plus fréquemment citée dans les articles scientifiques. Fondée largement sur des sondages, elle témoigne de son attachement au principe qu'il avait fait graver sur une face de son épée d'académicien: « La soumission aux données de l'expérience est la règle d'or qui domine toute discipline scientifique », et ce, quelles que soient les « vérités établies ». Eric Barthalon conclut en soulignant l'extraordinaire fécondité et l'actualité de la théorie d'Allais, qui montre notamment qu'une politique rationnelle ne peut « se fonder uniquement sur le 'scénario central' et ignorer l'importance psychologique des événements extrêmes, fussent-ils de faible probabilité ». En ce sens, Allais apparaît comme un précurseur du principe de précaution et de la théorie du « cygne noir ».

L'article suivant est consacré aux réflexions d'Allais sur les questions monétaires, sujet auquel il accordait la plus grande importance. L'auteur, Jean-Marie Durand, cite cette phrase du maître : «... les aspects les plus importants d'une économie de marchés, qu'on la considère du point de vue de l'efficacité économique, de la répartition des revenus, ou de la sécurité de l'emploi et des ressources, ce sont indiscutablement au regard des données de l'observation, ses aspects monétaires ». Malheureusement, les craintes d'Allais sur les déséquilibres du système et les effets pervers de la finance « virtuelle » se sont bien réalisées. Il écrivait dès 1987 « Partout la spéculation est favorisée par le crédit puisque qu'on peut acheter sans payer et vendre sans détenir »12, anticipant avec 20 ans d'avance la crise des subprimes de 2007-2008. La mise en oeuvre des solutions préconisées par Allais pour remédier à ces déséquilibres ne semble cependant toujours pas à l'ordre du jour...

Nous reproduisons ensuite un article de Maurice Allais intitulé « La mondialisation des échanges, mythologies et réalité »13, qui donne des éléments de réponse à ces questions si fréquemment posées après qu'il ait sévèrement critiqué le traité de Maastricht en 1992: était-il en vérité libéral ou protectionniste? Ou bien avait-il été d'abord libéral et devenu ensuite protectionniste? En fait, Maurice Allais a toujours été libéral mais sans dogmatisme et surtout avec un souci permanent des aspects sociaux. Il pose la question : Faut-il que l'Union européenne poursuive « une politique sans limites de libre-échange; et en accepte les conséquences inéluctables, à savoir: une augmentation considérable des inégalités sociales, ou un chômage majeur; et à terme, dans l'un et l'autre cas, une explosion sociale, tôt ou tard inévitable, résultant d'une situation sociale insupportée et insupportable » ? On est à nouveau frappé par son côté visionnaire quand il écrit « On soutient que des pays à bas salaires, comme la Chine, vont se spécialiser dans des activités à faible valeur ajoutée alors que des pays développés, comme la France, vont se spécialiser de plus en plus dans les hautes technologies. Mais c'est là méconnaître totalement les capacités de travail et d'intelligence du peuple chinois. A continuer ainsi à soutenir des absurdités, l'Union européenne va au désastre. »

Mais Allais n'a pas été seulement un grand chercheur, il a été - tout autant - un grand professeur. Deux articles sont consacrés à ce sujet. Le premier a été écrit par Hubert Lévy-Lambert, qui fut l'élève de Maurice Allais à l'École des mines de Paris. Ce dernier y enseigna l'économie générale durant... 44 ans, de 1944 à 1988, exerçant une influence considérable sur ses élèves, tant ingénieurs civils que membres du Corps des mines. Ces cours étaient complétés par un séminaire ouvert à un public élargi et de haut niveau, qui eut un grand impact, notamment dans le domaine énergétique.

Maurice Allais a également enseigné durant une quinzaine d'année l'économie monétaire à l'université de Nanterre, assisté par son épouse Jacqueline Bouteloup-Allais. C'est le seul lieu où il ait, semble-t-il, dirigé des travaux de recherche. Georges Prat, qui fit sa thèse sous la direction d'Allais décrit dans un article très riche l'enseignement du maître et le déroulement de ses cours, mais aussi son tempérament et ses relations avec le monde universitaire. Il souligne la modernité de ses méthodes pédagogiques avec l'utilisation de panneaux couverts de formules et la projection de diapositives - en quelque sorte, une préfiguration de PowerPoint. Certes, avec son caractère entier et ses thèses réputées libérales, Allais n'a pas entretenu des relations très étroites et chaleureuses avec ses collègues de l'université de Nanterre des années 1970. Mais celle-ci lui a cependant témoigné sa reconnaissance en lui décernant sa médaille d'or et, bien des années après, en baptisant du nom de Maurice Allais le grand amphithéâtre du bâtiment d'économie, puis le bâtiment lui-même.

L'article suivant, écrit par Jean-Bernard Deloly, touche à la partie la plus controversée de l'oeuvre de Maurice Allais : celle consacrée à la physique. Il lui accordait pourtant une grande importance et lui a toujours consacré une part significative de son temps, déployant la même passion, la même créativité et la même indépendance d'esprit que dans ses travaux d'économie. Mais comme l'a montré l'historien des sciences Dominique Pestre, l'organisation de la recherche en sciences « dures » avait connu une profonde mutation après la Seconde Guerre mondiale: «Au premier rang des préoccupations, la transformation du laboratoire, d'espace confidentiel en un lieu réunissant des équipes fournies, pourvues d'une solide instrumentation ». Un homme seul n'était plus légitime pour intervenir dans ce cadre. Malgré un peu de sponsoring, Allais ne pouvait réunir les sommes nécessaires pour financer les expériences utiles pour étayer ses thèses. Et son tempérament ombrageux l'empêchait de coopérer avec des institutions établies. Peut-être a-t-il eu tort de s'obstiner dans ses convictions, alors qu'il ne disposait pas des moyens nécessaires à ses ambitions. Cela a nui à sa réputation et l'a fait écarter de quelques places honorifiques. Mais peut- être aussi, si l'on se penche sur ses travaux, y trouvera-t-on quelques intuitions fulgurantes qui, développées avec des méthodes d'aujourd'hui, pourraient s'avérer fructueuses...

Le numéro se termine par un article passionnant de Bertrand Munier et Jean-Claude Trichet, « Maurice Allais au risque du XXIe siècle », qui montre combien la pensée du maître peut aider à éclairer notre époque dans de nombreux domaines. Force est de constater que bien des dangers sur lesquels Allais avait alerté se sont malheureusement concrétisés. Ainsi de la multiplication des rentes de situation, qu'il a si souvent dénoncées, amenant aujourd'hui à un véritable « capitalisme de rentiers » : rente pétrolière, rente immobilière dans les grandes métropoles, rémunérations injustifiables de certaines professions, tels les traders, rentes de nouveaux monopoles bénéficiant du principe « the winner take all » (les GAFA notamment). L'article met en évidence une conséquence bien actuelle du fameux « paradoxe d'Allais » : dans des secteurs où la sécurité semble quasi-absolue, l'opinion exige que les risques résiduels soient totalement supprimés « quoi qu'il en coûte », alors que bien moins d'efforts sont fait sur des sujets où les risques sont bien plus considérables...

Dans un autre domaine, les dangers qui avaient amené Allais à s'opposer au traité de Maastricht se sont bien réalisés et la construction européenne est en panne. Il avait aussi alerté très tôt sur les déséquilibres du système monétaire et les risques liés au surendettement, comme sur ceux résultant d'un libre-échangisme sans régulation. Nous avons déjà abordé ces thèmes.

Certes, Maurice Allais n'est plus là pour nous donner son avis sur les affaires du moment, mais il nous a laissé des outils puissants pour les analyser. Sachons en faire bon usage !

Je vous souhaite une bonne lecture de ce numéro passionnant, dont je remercie vivement les auteurs et particulièrement Christine Allais qui a bien voulu en assurer la coordination.

Biographies des auteurs

Christine ALLAIS est la fille unique de Maurice Allais. À la suite de la disparition de son père, elle a été à l'initiative de la création, en 2011, d'une fondation en mémoire de celui-ci: la Fondation Maurice Allais sous égide de la Fondation ParisTech, dont elle préside le Comité de fondation.
Diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris et titulaire d'une maîtrise de droit public de l'Université de Paris II, Christine Allais est entrée au Sénat comme administrateur en 1986. Après y avoir travaillé successivement au service de la bibliothèque et des archives, auprès de la commission des finances puis de la commission des lois, au service de la séance et comme responsable administratif de la délégation aux droits des femmes, elle est aujourd'hui conseiller hors classe à la division de la Présidence et du Bureau du Sénat. Elle a par ailleurs exercé les fonctions de maître des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'État de 2008 à 2012. Elle est chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur.

Eric BARTHALON, ancien élève du Lycée Louis-le-Grand, diplômé de l'École supérieure de commerce de Paris et licencié en droit, est directeur de la recherche sur les marchés de capitaux au sein du groupe Allianz, qu'il a rejoint en 2000 après avoir été directeur de la recherche économique du groupe Paribas. Dans l'assurance comme dans la banque, Eric Barthalon a partagé sa vie professionnelle entre, d'une part, responsabilités opérationnelles dans le domaine de la gestion de portefeuille et, d'autre part, recherche économique et financière. Il est l'auteur d'un livre - Uncertainty Expectations and Financial Instabilité Reviving Allais's Lost TheoryofPsy- chological Time - publié en 2014 par Columbia University Press, New York, et nominé en 2015 par le jury du Prix Maurice Allais de science économique. Il enseigne dans le cadre du mastère de gestion globale des risques de Mines ParisTech et du Master in Finance de l'European Business School de l'Université de Wiesbaden.

Pierre COUVEINHES: X 1970, ingénieur général des mines honoraire, il est depuis août 2016 membre associé du Conseil général de l'économie (CGE) au ministère de l'Economie et des Finances. Il a exercé des responsabilités variées en entreprise et dans l'administration, dans des secteurs tels que l'énergie, la sidérurgie, l'audiovisuel et l'édition. Il est président de la SABIX depuis juin 2014 et membre du comité éditorial de La Jaune et la Rouge depuis juin 2013.
Voir aussi : Wikipedia

Jean-Bernard DELOLY : Ancien élève de l'École polytechnique (X 1965) et de l'École nationale supérieure des télécommunications (1968-1970), il est ingénieur général de l'armement (2e section depuis 2003).
Il a travaillé de 1970 à 1975 au département « traitement du signal » du Centre national d'études spatiales, division satellites, puis à la Délégation générale pour l'armement (1975- 2003), avec des postes à la direction des missiles et de l'espace, à la direction des armements terrestres, à la direction des ressources humaines et à la direction des systèmes et de la prospective. Il a ensuite été chargé de mission à la direction des études de l'École centrale de Paris de 2004 à 2009. Il a parallèlement enseigné le traitement du signal de 1974 à 1985 à l'École nationale supérieure de l'aéronautique et à l'École supérieure d'électricité. Il s'intéresse depuis 2004 aux travaux de Maurice Allais en physique, et est membre du comité de fondation de la Fondation Maurice Allais depuis sa création en 2011.

Jean-Jacques DURAND est professeur émérite de l'Université Rennes 1. Lors de ses études d'économie à l'Université Paris X-Nanterre, il rejoint les séminaires de formation et de recherche du Pr. Maurice Allais sous la direction duquel il rédige une thèse de doctorat, soutenue en 1977, sur le thème de la dynamique des taux d'intérêt à court terme. Celle-ci est suivie en 1978 d'une thèse complémentaire sur la création monétaire et la réforme du crédit. Médaille de bronze du CNRS en 1977, il enseigne à l'Université Paris 2 tout en poursuivant ses activités de recherche dans le domaine monétaire au sein du Centre Clément Juglar dirigé par Maurice Allais. Agrégé en sciences économiques, il rejoint en 1988 l'Université Rennes 1 où il enseigne la macroéconomie et la théorie monétaire. Il a dirigé 25 thèses, dont certaines en co-tutelle avec des universités étrangères, et a assuré jusqu'en 2007 la direction de l'axe macroéconomie, monnaie et finance du Centre de recherche en économie et gestion (CREM), UMR CNRS, dont il est toujours membre.
Jean-Jacques Durand a été doyen de la Faculté des sciences économiques de 1992 à 1997, puis vice-président de l'Université Rennes 1 de 2001 à 2012, chargé des relations internationales. Il a mis en place de nombreux doubles diplômes avec des universités étrangères en Afrique et en Asie au sein desquels il enseigne toujours.
Il est docteur honoris causa de l'Université d'Antananarivo à Madagascar, Honorary Professor de l'Université de Hué au Vietnam, chevalier dans l'ordre national du Mérite et commandeur dans l'ordre des Palmes académique.

Hubert LÉVY-LAMBERT est ancien élève de l'École polytechnique (X 53) et ingénieur en chef des mines (CM55). Après quelques années au ministère de l'Industrie puis à la Direction de la prévision, il a travaillé à la Société Générale et dans différentes banques avant de créer Paref, société d'investissement immobilier cotée en bourse. Parallèlement à ses activités professionnelles, il a enseigné l'économie d'entreprise au Centre d'étude des programmes économiques (Cepe) et à l'École nationale de la statistique (Ensae), et écrit différents article et livres d'économie parmi lesquels La Vérité des prix, La Rationalisation des choix budgétaires et Les Choix économiques dans l'entreprise et dans l'administration. L'enseignement du professeur Allais a marqué fortement sa pensée et son action économique.

Thierry de MONTBRIAL est le président de l'Institut français des relations internationales (IFRI), qu'il a fondé en 1979. Membre de l'Académie des sciences morales et politiques depuis 1992 et membre associé de nombreuses académies étrangères, il a lancé en 2008 la World Policy Conférence. Il a dirigé le département de sciences économiques de l'École polytechnique de 1974 à 1992 et mis sur pied le Centre d'analyse et de prévision (actuellement Centre d'analyse et de prévision stratégique) du ministère des Affaires étrangères, dont il a été le premier directeur (1973-1979).
Il est l'auteur de plus de vingt livres, dont le dernier paru en France est Vivre le temps des troubles, Albin Michel, 2017, (Living in Trou- bled Times. A New Political Era, 2018).
Grand officier de la Légion d'honneur, Thierry de Montbrial est X 1963, docteur en économie mathématique de l'Université de Berkeley (Californie) et ancien ingénieur général au Corps des mines.

Bertrand MUNIER est docteur d'État en économie et diplômé de l'Institut d'études politiques. Directeur du Département d'économie à l'ENS de Paris-Saclay (1988-2004), directeur de laboratoire CNRS, professeur émérite à la Sorbonne, il a été professeur invité aux universités du Washington, de Californie, de Cologne et de New York. Il a créé, entre autres filières, le mastère spécialisé en management global des risques de la Conférence des grandes écoles, et a été conseil dans l'énergie, l'agriculture et les services financiers. Élu au Comité national du CNRS, Bertrand Munier y a côtoyé Maurice Allais et en est devenu l'ami pendant plus de trente ans. Il préside le Conseil scientifique de la Fondation Maurice Allais depuis 2012.
Auteur d'une quinzaine d'ouvrages et d'une centaine d'articles scientifiques, docteur honoris causa, Bertrand Munier a reçu plusieurs prix internationaux, dont le prix Ludwig Boltzmann et le prix J-P. Lepetit à EDF. Il est chevalier des Palmes académiques et chevalier de la Légion d'honneur.

Georges PRAT, docteur en sciences économiques et licencié en sociologie, est actuellement directeur de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique. Il dirige un séminaire de recherche en seconde année de Master à l'Université de Paris X- Nanterre et est membre du laboratoire Eco- nomiX associé au CNRS. Ses travaux portent essentiellement sur les prix d'actifs financiers (cours boursiers, taux d'intérêt, taux de change, prix du pétrole), et plus particulièrement sur la représentation des anticipations et du risque. Au plan de la méthode, il privilégie les enquêtes d'opinion auprès d'experts pour mesurer les rentabilités espérées et utilise les méthodes de l'économétrie non linéaire, notamment pour rendre compte des ajustements non instantanés entre les prix d'actifs et les fondamentaux économiques et pour représenter des variables non observables telles que par exemple la volatilité anticipée et le degré d'aversion au risque. Une vue détaillée de son parcours et de sa démarche scientifique sont donnés dans l'interview situé au début de l'ouvrage intitulé « Uncertainty, Expectations and Asset Price Dynamics », Essays in Honor of Georges Prat, Springer, 2018.

Jean-Claude TRICHET est président de la Commission trilatérale pour l'Europe, président honoraire de l'Institut Bruegel (Bruxelles), président honoraire du groupe des 30 (Washington) et membre de l'Académie des sciences morales et politiques.
Il a été président de la Banque centrale européenne de 2003 à 2011, gouverneur de la Banque de France de 1993 à 2003 et directeur du Trésor de 1987 à 1993. Il a été président du Club de Paris, président du Comité monétaire européen, président du Groupe des 10 gouverneurs de banque centrale et président de la Réunion de l'économie mondiale à Bâle. Il a été président de la Société de gestion des participations aéronautiques (Sogepa) en 2012 et 2013, et administrateur de Airbus Group (2012-2018). Il a été nommé « Personnalité de l'année » du Financial Times en 2007.
Né à Lyon en 1942, M. Trichet est inspecteur général des Finances honoraire et ingénieur civil des Mines. Il est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, de l'Université de Paris (économie) et de l'ENA. Il est docteur honoris causa de plusieurs universités (Liège, Stirling, Montréal, Tel Aviv, Bologne, Sofia).