La géodésie s'occupe de la détermination mathématique de la forme de la Terre. Les observations géodésiques conduisent à des données numériques: forme et dimensions de la Terre, coordonnées géographiques des points, altitudes, déviations de la verticale, longueurs d'arcs de méridiens et de parallèles, etc.
La topographie est la sœur de la géodésie. Elle s'intéresse aux mêmes quantités, mais à une plus petite échelle, et elle rentre dans des détails de plus en plus fins pour établir des cartes à différentes échelles et suivre pas à pas les courbes de niveau. La topométrie constitue la partie mathématique de la topographie.
La cartographie proprement dite est l'art d'élaborer, de dessiner les cartes, avec souvent un souci artistique.
Bien qu'apparentée à ces sciences, et même longtemps indistincte de la cartographie, la géographie consiste plus spécifiquement à observer et à décrire notre environnement physique et ses modifications. Nous n'en traiterons pas ici séparément. De toute façon, il est bien évident que ces différentes sciences s'entrelacent étroitement.
Les sources documentaires utilisées sont données dans la bibliographie.
Le problème essentiel de la géodésie consiste à définir par des nombres (angles et distances) les positions relatives des points de repère. Ces points géodésiques sont matérialisés par des mires installées sur les sommets et les clochers, ou par de simples bornes. Du point de vue mathématique, le problème est complètement résolu si l'on dispose de mesures d'angles et de longueurs assez nombreuses pour déterminer les triangles formés par les points et les dièdres qui permettent de fixer les altitudes relatives des différents plans. Mais il est nécessaire de rapporter ces mesures à un système de trois axes. Il faut substituer à la surface physique réelle de la Terre, avec ses montagnes et toutes ses variations de terrain, une surface théorique facile à définir géométriquement au moyen de quelques paramètres et, surtout, facile à déterminer expérimentalement en chaque endroit où l'on en a besoin. Ça ne peut être une sphère puisque la Terre n'en est pas une parfaite.
C'est là qu'intervient la notion de verticale qui est facile à définir partout grâce à un fil à plomb. Le point où cette verticale rencontre la sphère céleste s'appelle le zénith. Le plan qui lui est perpendiculaire permet de définir l'horizontale et il est donné par la surface d'un liquide au repos. La verticale en un point est la seule donnée géométrique qui soit absolue, c'est-à-dire indépendante des points voisins. La surface terrestre théorique devra donc être perpendiculaire, en tout point, à la verticale. Mais il y a une infinité de telles surfaces de niveau, parallèles entre elles. On choisira celle qui vient se raccorder, le long du littoral, à la surface de la mer. Un nouveau problème se pose alors: le niveau de la mer change et il faut donc déterminer son niveau moyen qui servira de zéro. Cette détermination s'effectue grâce à un appareil appelé marégraphe. Cependant rien ne nous dit que tous ces zéros, obtenus en divers points de la Terre, appartiendront rigoureusement à la même surface de niveau.
Par conséquent, il faut choisir un point origine, sur la côte ou non, et prendre comme surface de comparaison la surface de niveau définie de proche en proche par l'ensemble des verticales et qui passe par cette origine. Cette surface de niveau, qui se rapproche le plus possible de la surface des mers, s'appelle le géoïde. C'est également la surface équipotentielle du champ de pesanteur terrestre en rotation. Le géoïde a été introduit en 1873 par le mathématicien allemand Johann Benedict Listing (Francfort, 25 juillet 1808 - Göttingen, 24 décembre 1882). Mais cette surface empirique est irrégulière et peu accessible au calcul. La Terre est un solide de révolution un peu aplati aux pôles. On substitue donc au vrai géoïde une approximation donnée par un ellipsoïde de révolution, facile à définir mathématiquement à l'aide de deux paramètres (le grand et le petit axe), mais dont les écarts verticaux par rapport au géoïde peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres dans un sens comme dans l'autre. La principale conséquence de ces différences est d'introduire un écart entre la normale en un point de l'ellipsoïde et la normale au même point du géoïde (la verticale). Cet angle s'appelle la déviation de la verticale. Cette déviation est faible mais peut cependant atteindre des valeurs non négligeables dans les zones montagneuses et les zones volcaniques. Cependant, elle ne dépasse jamais 100" et, en France, elle est inférieure à 15". Les observations faites par rapport à la verticale doivent donc être corrigées de cette déviation pour être ramenées à la normale à l'ellipsoïde.
La relation étroite entre géodésie et astronomie de position et l'existence d'un axe de rotation stable pour la Terre ont conduit à l'adoption d'un système de coordonnées géographiques. La colatitude d'un point est l'angle de la verticale avec la droite parallèle à l'axe de la Terre. Un parallèle est le lieu des points ayant même colatitude. Le parallèle qui passe par les points de colatitude égale à 90 degrés s'appelle l'équateur. Il sert d'origine au repérage des latitudes. Les parallèles sont donc des cercles de plus en plus petits qui ceinturent le globe de l'équateur aux pôles. Un plan méridien est un plan formé par la verticale, donnée par le fil à plomb, et la droite parallèle à l'axe de rotation de la Terre. Les méridiens sont des grands cercles de la Terre passant pas les pôles. Comment savoir si deux points sont situés sur le même méridien? La réponse à cette question majeure est simple: l'ombre. La longueur de l'ombre d'un bâton, le gnomon, planté verticalement dans le sol change avec l'heure. L'ombre la plus courte s'appelle l'ombre méridienne car on l'observe quand le Soleil passe au méridien du lieu. Sa hauteur au dessus de l'horizon est alors la plus grande possible; c'est le midi vrai. Au nord du Tropique du Cancer, l'ombre méridienne est orientée du Nord (sommet du piquet) au Sud (pied du piquet). Si deux points sont sur le même méridien alors leurs ombres méridiennes sont alignées; elles suivent le méridien. La différence de longueur des ombres méridiennes de deux bâtons identiques situés sur le même méridien permet de connaître l'angle de l'arc qui les intercepte. En ajoutant un socle au gnomon, on obtient un cadran solaire rudimentaire. La longitude est l'angle d'un plan méridien choisi comme origine et du plan méridien du point considéré. Il existe une longitude astronomique définie sur le géoïde qui diffère de la longitude géodésique définie sur l'ellipsoïde. La latitude d'un lieu est l'angle entre la verticale de ce point et celle du point de l'équateur situé sur le même méridien. C'est l'angle complémentaire de la colatitude. Le parallèle de latitude zéro est donc l'équateur et sa position est fixée par les lois de la nature. Au contraire, le méridien de longitude zéro peut être fixé arbitrairement; on voulut d'abord le fixer aux Canaries car ce sont les terres européennes les plus à l'Ouest (mais laquelle de ces îles fallait-il choisir? ), puis ce fut longtemps le méridien passant par Paris et c'est maintenant celui de Greenwich.
Les anciens croyaient que la Terre était plate. Mais, était-ce un disque ou un carré? Les deux points de vue pouvaient être admis et l'ont été selon les cultures.
Les premières conceptions géodésiques sont naturellement liées à l'astronomie. Thalès de Milet (Milet, c. 625 - c. 547 av. J.-C.) montre que les étoiles décrivent des cercles autour du pôle et prédit une éclipse du Soleil vers 585 av. J.-C. Grâce à la géométrie (et son fameux théorème en particulier) il calcule la hauteur des pyramides et mesure des distances en mer. Les Présocratiques (Anaximène, Anaximandre, Parménide, Heraclite, Empédocle, etc.) ont longtemps penché vers une conception plate de la Terre. Cependant ce sont les Grecs qui, les premiers, tiendront des raisonnements scientifiques en faveur de la rotondité de la Terre. En effet, Anaxagore, au Vè siècle avant J.-C, avait remarqué l'ombre circulaire faite par la terre lors des éclipses de Lune. La vision des navires à l'horizon renforçait cette conception. Enfin, quand on marche en direction du Nord, on voit l'Etoile Polaire de plus en plus haut dans le ciel et le Soleil de plus en plus bas à midi, phénomènes qui ne pourraient avoir lieu si la Terre était plate. Eudoxe de Cnide (Cnide, c. 406 - c. 355 av. J.-C.) pense que la Terre est une sphère au centre d'une autre sphère plus grande. Pour les Ioniens, la géographie est inséparable de la géométrie.
La première véritable mesure de la circonférence d'un méridien terrestre est due à Eratosthène de Cyrène (Cyrène, Libye, c. 284 - Alexandrie, c. 192 av. J.-C.). Mathématicien et astronome, il vivait à Alexandrie dont il dirigeait la fameuse bibliothèque. Entre Syène (Assouan) et Alexandrie, le tracé du cours du Nil ne s'écarte pas trop de celui d'un méridien. Ainsi que l'atteste l'architecte romain Marcus Vitruvius Pollio (Vitruve) au premier siècle av. J.-C., Erathosthène remarqua qu'à midi, au solstice d'été, le soleil frappait le fond des puits à Syène, proche du Tropique du Cancer, alors qu'il se trouvait à 7° 12 du zénith à Alexandrie. Les Grecs savaient en effet mesurer des angles dès le IVè siècle avant J.-C. Le Parménide de Platon (Athènes, c. 428 - Athènes, c. 347 av. J.-C.) cite l'alidade, une règle orientable munie de repères, les pinnules, à ses extrémités et qui permet de viser un point. Grâce à un cercle gradué, on peut ainsi connaître l'angle entre deux directions. Pour appliquer les résultats de géométrie d'Euclide, Eratosthène supposa le Soleil situé à l'infini et assimila ses rayons à des droites parallèles. Avec ces deux hypothèses, il put alors appliquer le théorème qui dit que les droites qui tombent sur des parallèles produisent des angles alternes égaux. La distance entre Syène et Alexandrie étant de 5000 stades (1 stade = environ 185m), Eratosthène obtint 11562 km pour le quart du méridien terrestre. Signalons cependant que la longueur d'un stade diffère selon les commentateurs.
Cent ans plus tard, Posidonius d'Apamée (135 - 50 av. J.-C.) refit la mesure sur l'arc entre Rhodes et Alexandrie et trouva 11100 km. Il avait obtenu cette valeur en observant l'étoile Canopus depuis ces deux lieux. Ses estimations de distance et d'angle étaient fausses mais les erreurs s'étaient compensées! D'autres mesures, souvent moins exactes et sous-estimées, suivront au cours des siècles. Au premier siècle de notre ère, Héron d'Alexandrie publie La Dioptre, ouvrage qui peut être considéré comme le premier traité d'arpentage. Il décrit l'utilisation de l'alidade, de la règle et du cordeau et donne des méthodes pour déterminer les distances entre des points même s'ils sont inaccessibles.
Ce fut Claude Ptolémée (Ptolémaïs de Thébaide, c. 100 - Canope, c. 170) qui montra, dans son Almageste, comment déterminer la latitude à partir de la longueur du jour le plus long (au solstice d'été), du moins pour les lieux situés au nord du Tropique du Cancer. Pour la zone tropicale, il détermine, en fonction de la latitude, l'heure à laquelle le Soleil passe au zénith. Malgré la médiocrité des instruments de mesure du temps de l'époque, il atteignit une précision de 2 ou 3 degrés, bien suffisante alors. Mais, en fait, le problème n'est pas aussi simple que cela car le mouvement du Soleil n'est pas uniforme. Il est plus rapide en hiver car l'orbite terrestre n'est pas un cercle mais une ellipse et la distance Terre-Soleil est actuellement minimale vers le 2 janvier et maximale vers le 6 juillet. Mais ces dates elles-mêmes avancent au cours des siècles; elles dépendent d'un phénomène découvert par Hipparque (Nicée, 190 - 125 av. J.-C). L'axe de rotation de la terre est en effet incliné de 23°26' par rapport au plan de l'écliptique (sa trajectoire autour du Soleil). Comme c'est le cas pour une toupie, cet axe tourne lui-même lentement (en 26000 ans) autour de la perpendiculaire au plan de l'écliptique en gardant pratiquement tout le temps cette même inclinaison. C'est le phénomène de précession des equinoxes. Ce phénomène est lui-même perturbé par la présence de la Lune qui induit une légère oscillation de l'inclinaison de l'axe de rotation de la Terre, la nutation découverte par l'astronome anglais James Bradley (Sherbourne, 1692 - Chalford, 13 juillet 1762) en 1737. On peut alors penser à mesurer la latitude à l'aide de la hauteur de l'Étoile Polaire, qui indique l'axe du monde. Mais, à cause de la précession des equinoxes, cette étoile n'est pas toujours celle qui se trouve la plus voisine du Pôle Nord céleste. Ce n'est que vers 1400 qu'elle le devint. Ainsi, les Égyptiens orientèrent-ils leurs monuments en fonction d'une autre étoile alors que, quelques siècles plus tard, plus aucune étoile n'était proche du Pôle. On peut remédier à cela en faisant la moyenne entre la position la plus basse et la position la plus haute d'une étoile qui tourne autour du Pôle. Mais une étoile est invisible le jour et les deux mesures ne peuvent être réalisées qu'à quelques mois d'intervalle. De plus, qui dit deux mesures dit deux fois plus d'erreurs. C'est ainsi que l'on a longtemps cru que Byzance et Marseille étaient à la même latitude alors qu'il y a deux degrés d'écart, soit 220 km. Enfin, est-il possible, surtout lorsque l'on est en mer, d'attendre plusieurs mois pour connaître sa position? On dressa donc des catalogues d'étoiles. Si l'on connaît leurs écarts au Pôle, l'une d'elles sera peut-être en son point le plus haut ou le plus bas et, par simple addition ou soustraction, on calculera sa latitude. Mais encore faudra-t-il tenir compte de la réfraction atmosphérique, de l'aberration et de l'erreur de parallaxe! On commence à saisir les difficultés du problème.
Mais revenons à Ptolémée; il donna la valeur de 30000 km pour la circonférence terrestre. C'est cette sous-estimation qui décidera Christophe Colomb (Gênes, 1451 - Valladolid, 20 mai 1506) à entreprendre en 1492 son voyage vers, croyait-il, l'Asie. S'il avait connu la véritable valeur de la circonférence terrestre, sans doute ne se serait-il pas engagé dans l'aventure. La réalité de la sphéricité du globe terrestre sera définitivement prouvée au retour du voyage de Fernào de Magalhães, dit Magellan (Sabrosa, Portugal, c. 1480 - Philippines, 1521) en 1522.
Les Grecs avaient donc établi la sphéricité de la Terre, ils en avaient évalué la dimension, ils étaient capables de repérer des positions à sa surface et savaient déterminer la longitude par l'observation des éclipses. L'astronomie les avait également conduit à distinguer les pôles qui sont déterminés par l'axe de révolution de la Terre, l'équateur, les tropiques qui marquent le dernier point où le Soleil s'élève au zénith pendant l'été et les cercles polaires. Ces conceptions étaient inséparables de l'hypothèse géocentrique qui place la Terre au centre de l'Univers.
Le déclin des connaissances géographiques commence en Europe avant la fin de l'Empire Romain en 476. Le bouillonnement intellectuel disparaît. L'hypothèse géocentrique et l'idée de la sphéricité de la Terre qui l'accompagne sont même rejetées par la majorité de la classe cultivée privée de l'accès au grec, langue scientifique par excellence. Certains savoirs antiques se heurtent au christianisme. Le mythe biblique de la Terre plate refait surface chez Saint Augustin (Thagaste, Algérie, 13 novembre 354 - Hippone, 28 août 430) et les géographes Constantin d'Antioche, dit Cosmas Indicopleustes (Vie siècle), et Isidore de Seville (Carthagène, c. 560 - 4 avril 636) s'y rallient. La Terre est un disque dont le centre est Jérusalem et la périphérie la Mare oceanum.
En 827, le Khalife Al-Mamoun fit reprendre la mesure du méridien sur un arc de 2 degrés. Elle s'effectua dans la plaine du Sinjar près de Bagdad et fut conduite par le célèbre mathématicien arabe Al-Khwarizmi (Bagdad, c. 780 - c. 850), l'inventeur de l'algèbre et dont le nom donnera le mot algorithme.
C'est lui également qui fit connaître les chiffres indiens à l'Occident. Les savants arabes utilisèrent des perches et obtinrent 11016 km.
Au Moyen-Age, la science se désintéresse de la question jusqu'en 1525, date à laquelle le mathématicien, astronome et médecin d'Henri II, Jean Fernel (Montdidier, 1497 - Paris, 1558) mesure l'arc entre les cathédrales de Paris et d'Amiens situées sur le même méridien. Il détermine d'abord la latitude de ces deux villes au moyen d'observations du soleil et mesure la distance qui les sépare en comptant le nombre de tours de roue de sa voiture. Il trouve 56746 toises (10011 km), un excellent résultat pour l'époque, cependant obtenu après des corrections assez arbitraires pour tenir compte des accidents de la route.
En 1661, le Jésuite Giovanni Battista Riccioli (Ferrare, 17 avril 1598 - Bologne, 25 juin 1671) mesure la distance zénithale de deux astres connus (angle entre la direction du zénith et celle de l'astre) et obtient 62900 toises pour le degré terrestre. Cette méthode, qui aurait été indiquée par Kepler, ne pouvait rien donner de précis car, encore actuellement, la mesure de distances zénithales est délicate à cause de la réfraction atmosphérique.
Une idée résolument nouvelle fut celle de la triangulation. Elle consiste à remplacer la mesure directe de la longueur d'un arc de méridien par une mesure indirecte au moyen des angles d'une triangulation. Une triangulation est constituée d'une chaîne de triangles adjacents dont les sommets se situent alternativement de part et d'autre de l'arc AB du méridien à mesurer. Le premier triangle doit avoir le point A comme sommet et le dernier triangle se terminer en B. À partir de la mesure de la longueur de l'un des côtés du premier triangle et de celles des angles, on détermine, à l'aide des formules de trigonométrie, les côtés de tous les triangles. On abaisse ensuite les hauteurs de tous les triangles sur le segment AB et l'on calcule ainsi peu à peu la distance AB.
L'avantage de la triangulation est, qu'au lieu d'avoir à mesurer avec précision une très grande distance, on ne doit plus mesurer qu'un seul côté d'un triangle beaucoup plus petit et des angles, mesures sujettes à des erreurs bien moindres. Les formules trigonométriques font le reste. Naturellement, puisque la Terre n'est pas plate, il faut utiliser des formules de trigonométrie sphérique. Cependant, pour de petites distances, l'erreur est faible et, de plus, des formules dues à Adrien Marie Legendre (Paris, 18 août 1752 - Paris, 5 janvier 1833) permettent de corriger facilement ces pertes de précision.
L'idée de la triangulation s'imposa peu à peu chez les savants et il est difficile de dire quel fut son véritable créateur. Grâce à la boussole, inventée par les Chinois et transmise en Europe par les Arabes, les marins pouvaient s'éloigner des côtes et garder leur cap. En connaissant la direction du trajet et la distance parcourue (le loch, une corde de chanvre graduée par des nœuds et que l'on laisse filer, le permet) on pouvait ainsi établir des cartes. En 1533, dans la deuxième édition de son Cosmograficus liber Petri Appiani (Apianus), Gemma Frisius (Dokkum, Pays-Bas, 8 décembre 1508 - Louvain, 25 mai 1555) donne en annexe un Libellus de locorum describendorum ratione, qui, en seize pages, fonde la géodésie moderne. Il explique comment des réseaux de triangles permettent d'arpenter des espaces aussi vastes qu'on le désire. Quatre ans plus tard, il décrit la construction de l'instrument dérivé de l'astrolabe destiné à ces mesures de terrain, le goniomètre, que son neveu Gualterus Arsenius ( ? - c. 1580) améliorera en y ajoutant une boussole.
La triangulation fut perfectionnée en 1556 par Niccolo Tartaglia (Brescia, 1499 - Venise, 13 décembre 1557) et mise en pratique par Jacob Roelofs, dit van Deventer d'après le lieu de sa naissance, pour réaliser des cartes des Pays-Bas entre 1557 et 1573. L'astronome danois Tycho Brahé (Knudstrup, 14 décembre 1546 - Prague, 24 octobre 1601) ainsi que Johannes Kepler (Weil der Stadt, Wurtemberg, 27 Décembre 1571 - Regensburg, 15 novembre 1630) en firent usage. D'autres suivront en Angleterre, en Allemagne, en France poussés par les progrès des instruments de mesure géodésique: le cercle hollandais de Jan Pietersz Dou (1573 - 1635) et le graphomètre de Philippe Danfrie (Bretagne, 1535 - Paris, 1606), puis le théodolite, inventé en Angleterre peut-être dès le XVIè siècle (et perfectionné ensuite par le mécanicien britannique Jesse Ramsden (Salterhebble, Yorkshire, 15 octobre 1735 - Brighton, 5 novembre 1800) au XVIIIè siècle).
La triangulation fut popularisée par le Hollandais Willebrord Snell Van Royen (Leiden, 1580 - Leiden, 30 octobre 1626), dit Snellius. En 1621, il effectua la triangulation de l'arc de 1°11` allant de Berg-op-Zoom à Alkmaar à l'aide de 33 triangles. Les angles étaient mesurés avec un arc-de-cercle de 3 pieds et demi de diamètre. La base, longue de 1230 mètres, fut mesurée avec une chaîne et vérifiée avec une règle en bois. Il se servit d'un quadrant de 5 pieds et demi de diamètre pour déterminer la latitude de chaque extrémité. Il observa l'azimut à Leyde. Ses calculs, faits dans le plan, lui donnèrent 10004 km.
Signalons les triangulations de Wilhelm Schickard (Herrenberg, Wurtemberg, 22 avril 1592 -Tübingen, 24 octobre 1635) dans le Wurtemberg en 1620, de Richard Norwood (Stevenage, Yorkshire, octobre 1590 - Bermudes, 1675) entre Londres et York en 1635, de Giovanni Battista Riccioli et Francesco Maria Grimaldi (Bologne, 2 avril 1618 - Bologne, 28 décembre 1663) près de Modène en 1645. Ensemble, ces derniers firent paraître une carte de la Lune dont la nomenclature est toujours en vigueur chez les astronomes.
La triangulation requérait de maîtriser le mieux possible les mesures angulaires. Elle ne prit véritablement son essor qu'au début du XVIè siècle avec l'introduction de la planchette en Angleterre et en Allemagne.
Depuis longtemps les marins savent déterminer la latitude grâce à la hauteur du Soleil et des étoiles au-dessus de l'horizon. Un capitaine peut ainsi tracer sa route facilement le long d'un parallèle. Mais la mesure de la longitude est beaucoup plus complexe car c'est une fonction du temps. En effet, en 24 heures, la Terre effectue une rotation complète, soit 360 degrés. Une heure représente donc 15 degrés. En d'autres termes, un degré de longitude correspond à 4 minutes quelle que soit la latitude. Mais la valeur kilométrique de chaque degré décroît de l'équateur, où il vaut 109 431 mètres, aux pôles où il est nul.
Pour pouvoir calculer sa longitude par rapport au méridien d'origine ainsi que la distance parcourue, il faut connaître l'heure en ce méridien ainsi que l'heure locale. Ce qui peut maintenant sembler une opération banale ne l'était absolument pas autrefois, même à l'époque des horloges. Les meilleurs mécanismes se déréglaient sous l'influence des mouvements du bateau et des variations de température, de pression, de gravité, de magnétisme. Les marins s'échouaient ou faisaient naufrage ou, dans le meilleur des cas, n'arrivaient pas à la destination prévue.
On sait, depuis l'Antiquité, utiliser les éclipses pour mesurer les longitudes. Si l'on connaît l'heure exacte d'une éclipse en un certain lieu et qu'elle est observée à une heure différente là où l'on se trouve, on en déduit l'écart horaire et donc la différence de longitude. En 1514, l'astronome allemand Johannes Werner (1468 - 1528) remarqua qu'en une heure la Lune parcourt une distance à peu près égale à son diamètre. En établissant une carte des étoiles qui se trouvent sur le parcours de la Lune, on peut calculer l'heure à laquelle elle rencontre chaque étoile en un lieu donné et à une date donnée. En comparant avec l'heure à laquelle la Lune doit rencontrer une étoile particulière au point d'origine, on obtient l'écart en temps. Le problème était que les positions des étoiles et les mouvements de la Lune n'étaient qu'imparfaitement connus. Entre 1571 et 1577, l'espagnol Juan Lopez de Velasco (Velasco, c. 1530-1540 - Madrid, 1598) chercha à déterminer la position exacte du Nouveau Monde d'après les éclipses de 1577, 1578 et 1584. La découverte des satellites de Jupiter par Galileo Galilei, dit Galilée, (Pise, 15 février 1564 - Arcetri, 8 janvier 1642) multiplia les possibilités de mesure mais les tables permettant d'effectuer les calculs ne furent établies qu'à la seconde moitié du XVIIè siècle. Mais les éclipses étaient un phénomène trop rare. La détermination astronomique des coordonnées d'un point restera longtemps une opération difficile. Elles n'étaient connues que pour 200 points en 1760 et pour 1540 en 1787. Les cartes de Ptolémée et d'Ératosthène, exactes quant aux latitudes, étaient très erronées pour les longitudes. C'est ainsi que l'on croyait la Méditerranée orientale plus longue de mille kilomètres qu'elle ne l'est. L'erreur ne fut corrigée qu'en 1635 par Nicolas-Claude Fabri de Peiresc (Belgentier, 1er décembre 1580 - Aix-en-Provence, 24 juin 1637) qui avait organisé un réseau d'observation lui permettant de mesurer la différence de longitude entre Aix-en-Provence et Alep.
Il faudra attendre la mise au point des chronomètres de marine pour que le problème de la détermination exacte de la longitude reçoive une solution entièrement satisfaisante. Ce sera l'œuvre des horlogers du XVIIIè dont le plus inventif fut sans doute John Harrison (Foulby, Yorkshire, 24 mars 1693 - Londres, 24 mars 1776) entre 1735 et 1757. Un autre bond en avant sera réalisé avec l'avènement de la radiotélégraphie et les travaux de Giuseppe Marconi (Bologne, 25 avril 1874 - Rome, 20 juillet 1937) à partir de 1905.
La mesure de la longueur du méridien présente un intérêt scientifique particulier. La question est de connaître la forme exacte de la Terre. Le problème était posé depuis que Jean Richer (1630 - Paris, 1696), astronome à l'Observatoire de Paris, en mission à Cayenne (5° de latitude Nord) en 1672, avait remarqué que plus on s'approchait de l'équateur et plus ses horloges prenaient du retard. Donc le balancier allait plus lentement ou, en d'autres termes, la longueur du pendule battant la seconde était moins grande à Cayenne qu'à Paris. La pesanteur décroissait donc avec la latitude. Richer pensait que cela pouvait s'expliquer par un aplatissement de la Terre (Paris est plus rapproché du centre de la Terre que Cayenne; donc le globe est aplati en allant vers les Pôles) alors que Jean Dominique (Gian Domenico) Cassini (Perinaldo, 8 juin 1625 - Paris, 14 septembre 1712), premier directeur de l'Observatoire de Paris et fondateur de la lignée des astronomes de la famille Cassini, qui croyait en la sphéricité de la Terre, pensait que ce phénomène était dû à une différence de température.
En 1668, l'Académie des Sciences de Paris fut chargée par Jean-Baptiste Colbert (Reims, 1619 -1683), son fondateur, d'effectuer une nouvelle mesure du méridien et d'établir une carte de France plus exacte que celles qui existaient alors. Cette détermination commença en 1669, deux ans après la fondation de l'Observatoire de Paris. Elle fut confiée à l'astronome, académicien et abbé Jean Picard (La Flèche, 21 juillet 1620 - Paris, 12 octobre 1682). Ce spécialiste de géodésie s'était rendu en Norvège, à Uranienborg, là où Tycho Brahé (Knudstrup, 1546 - Prague, 1601) avait fondé son observatoire, afin de mesurer avec précision sa position et, par là, de pouvoir utiliser les observations des 777 étoiles qui servirent aussi à Johannes Kepler à découvrir les lois régissant le mouvement des planètes. Il rédigera deux importants traités, La mesure de la Terre (1671) et Traité du nivellement (1684), édité après sa mort par Philippe de La Hire (Paris, 18 mars 1640 - Paris, 21 avril 1718). Avec Adrien Auzout (Rouen, 28 janvier 1622 - Rome, 23 mai 1691), il avait inventé, en 1667, l'alidade holométrique dans laquelle la visée s'effectue à l'aide d'une lunette comportant une règle à éclimètre. Elle est utilisée pour les levés à moyenne et grande échelle. Il était donc parfaitement qualifié pour cette mission.
Les limites fixées à Picard pour ses mesures étaient Malvoisine, au sud de Paris, à 6 km de La Ferté-Alais, et Sourdon, à 20 km au sud d'Amiens. Il effectua le travail en 1669 et 1670. Il utilisa 13 triangles et deux bases, dont une pour la vérification des mesures. La base principale, de 11 km, s'étendait entre Villejuif et Juvisy; elle fut mesurée par arpentage, à l'aide de deux tiges de bois de 8 mètres. Il trouva, pour la longueur du degré de méridien, 57060 toises du Châtelet (1 toise = 194,904 cm), ce qui conduit à 111 092 mètres; la valeur exacte, à la latitude moyenne entre Paris et Amiens, est de 111 220 mètres. Il avait eu de la chance car ses erreurs de mesure s'étaient compensées!
Le méridien de Paris, la Méridienne comme on l'appelle, qui passe par le centre de l'Observatoire de Paris, devait être déterminé avec le plus de précision possible sur l'ensemble du territoire. Les expéditions précédentes n'avaient pas permit de trancher. La Méridienne de Picard fut donc prolongée au Nord jusqu'à Dunkerque et au Sud jusqu'à Collioure par Jean-Dominique Cassini et Philippe de La Hire. Leur travail fut continué par leurs fils Jacques Cassini (Paris 8 février 1677 - Thury, Oise, 18 avril 1756) et Gabriel-Philippe de La Hire (Paris, 25 juillet 1677 - Paris, 4 juin 1719) et le neveu de Cassini, Giacomo Filipo Maraldi (Perinaldo, 21 août 1665 - Paris, 1er décembre 1729). Il dura de 1683 à 1718. Utilisant une nouvelle méthode, qu'il avait mise au point en 1713, pour déterminer la longitude au moyen des tables des éclipses d'étoiles et de planètes par la Lune, Jacques Cassini calcula que le degré de méridien était plus long au sud de Paris qu'au nord. La Terre n'était donc pas une sphère parfaite, mais elle était allongée vers les pôles. Il calcula l'excentricité et trouva 0.144. Ces résultats semblaient être confirmés par la mesure de l'arc de parallèle entre Saint-Malo et Strasbourg qui s'effectua en 1733 - 1734. Cassini s'entêta dans son opinion jusqu'à sa mort en dépit des évidences de sa fausseté qui lui étaient présentées. Il semble que le premier à avoir formulé l'hypothèse de l'allongement vers les pôles ait été Jean Gaspard Eisenschmidt (1656 - 1712) dans son ouvrage Diatribe de Figura Telluris, paru à Strasbourg en 1691.
On a souvent affirmé qu'Isaac Newton (Woolsthorpe, Lincolnshire, 4 Janvier 1642 - Londres, 31 mars 1727) prit connaissance des résultats de Picard en 1684 et s'en servit pour confirmer ses lois de la gravitation universelle. D'après sa théorie, exposée dans son livre Philosophiae Naturalis Principia Mathematica paru en 1687, la force centrifuge devait entraîner l'aplatissement de la Terre au pôles. Pour arriver à cette conclusion, Newton calcule de combien la partie liquide de la Terre à l'équateur doit être plus élevée qu'aux pôles pour que les mers soient en équilibre en admettant qu'un ellipsoïde de révolution est une surface d'équilibre.
Il suppose, pour son raisonnement, qu'il existe deux canaux allant du centre de la Terre à la périphérie, l'un equatorial et l'autre polaire. En supposant une forme ellipsoïdale et homogène, il exprime ensuite que le poids total de l'eau est le même dans chacun des canaux. Il trouva ainsi un aplatissement de 1/230.
La question de la longueur du méridien était donc d'importance pour trancher entre les Cassini et Newton. La controverse durera plusieurs décennies. En 1733, Giovanni Poleni (Venise, 23 août 1683 -Padoue, 15 novembre 1761) fit remarquer que les erreurs de mesure dues à la précision des instruments ne permettaient pas de trancher entre les deux hypothèses. Seules de nouvelles mesures pouvaient départager les deux camps. Trois expéditions sont organisées. L'une, dirigée par Pierre Louis Moreau de Maupertuis (Saint-Malo, 28 septembre 1698 - Bâle, 27 juillet 1759), avec le physicien et astronome suédois Anders Celsius (Uppsala, 27 novembre 1701 - Uppsala, 25 avril 1744) et le mathématicien français Alexis Claude Clairaut (Paris, 7 mai 1713 - Paris, 17 mai 1765), se rendit en Laponie, près du Pôle Boréal, en 1737-1738. Ils mesurèrent un arc de 57' entre Kittis et Tornéa. La seconde, sous la direction de l'astronome Louis Godin (Paris, 28 février 1704 - Cadix, 11 septembre 1760), avec le géophysicien Pierre Bouguer (Le Croisic, 16 février 1698 - Paris, 15 août 1758), Joseph de Jussieu (Lyon, 3 septembre 1704 - Paris, 11 avril 1779), et Charles Marie de La Condamine (Paris, 28 janvier 1701 - Paris, 4 février 1774), opéra près de l'équateur, au Pérou, de 1735 à 1744, et mesura un arc de 3° 7' entre Tarqui et Cochasqui. Enfin une troisième s'en alla au Cap de Bonne Espérance en 1752 sous la conduite de l'abbé Nicolas Louis de La Caille (Rumigny, Champagne, 1713 - Paris, 1762). Un arc de 1° 13' fut mesuré. La précision des mesures a augmenté; en particulier les positions des étoiles sont mieux connues grâce à l'emploi de micromètres. Bien que l'aplatissement obtenu (1/215) soit trop fort, les résultats de ces expéditions, combinés à la mesure de l'arc de parallèle entre Sète et la Montagne Sainte-Victoire près d'Aix-en-Provence, donnèrent raison à Newton. Les mesures des Cassini n'avaient pas été faites avec assez de soin comme l'a souligné l'astronome Jean Baptiste Joseph Delambre (Amiens, 19 septembre 1749 - Paris, 19 août 1822). La mesure fut donc révisée en 1739-1744 entre Dunkerque et Collioure. Cette opération est connue sous le nom de Méridienne vérifiée. César-François Cassini de Thury (Thury, 17 juin 1714 - Paris, 4 septembre 1784), le fils de Jacques Cassini, y prit part. La conclusion fut la même: la Terre est aplatie aux pôles. Cassini de Thury se rallia à cette vue, s'opposant ainsi à sa famille. Des mesures de perpendiculaires à la Méridienne furent également menées à bien. Au terme de ces travaux, la France était couverte d'un réseau de près de huit cents triangles reliant les principales villes. La cartographie scientifique pouvait commencer.
Parallèlement aux mesures sur le terrain, les scientifiques avaient poursuivi leurs travaux théoriques. En 1690, le hollandais Christiaan Huygens (La Haye, 14 mars 1629 - La Haye, 8 juin 1695) se base, comme Newton, sur deux canaux, l'un equatorial et l'autre à une latitude quelconque. Il obtient un aplatissement de 1/578 (près de deux fois plus faible que celui actuellement mesuré) et arrive à la même valeur, que l'attraction soit constante ou qu'elle suive la loi de Newton. James Stirling (Garden, Stirlingshire, Ecosse, mai 1692 - Edimbourg, 5 décembre 1770), en 1735, écrit les équations d'équilibre d'un liquide homogène qui tourne autour d'un axe, en supposant que la résultante de la force centrifuge et de la force d'attraction est, en tout point, normale à cette surface. En première approximation, la solution est un ellipsoïde aplati et il donne la relation entre l'aplatissement a=(a-b)/a (où a et b sont respectivement le demi-grand axe et le demi-petit axe de l'ellipsoïde) et la vitesse angulaire de rotation. Clairaut obtiendra deux ans plus tard une relation entre aplatissement, pesanteur au pôle et à l'équateur, grand axe et vitesse angulaire. Clairaut s'attaque ensuite au cas d'une planète recouverte d'un liquide homogène, ne différant que peu de la sphère et composée de différentes couches solides, homogènes, séparées par des surfaces de même centre et dont la densité varie d'une couche à l'autre suivant une loi quelconque. Il examinera plus tard le cas d'une planète fluide, séparée en couches remplissant les mêmes conditions. Il montre, dans ces deux cas, qu'une figure d'équilibre peut être un ellipsoïde et il obtient l'équation aux dérivées partielles qui donne la variation « d'ellipticité » des diverses couches en fonction de la loi de variation de la densité. C'est à Clairaut que l'on doit la définition des surfaces de niveau, surfaces telles que la verticale leur soit perpendiculaire en chaque point. Ce sont donc, comme nous l'avons vu, des équipotentielles pour la pesanteur terrestre.
Puis ce sera au tour de Colin Maclaurin (Kilmodan, février 1698 - Edimbourg, 14 juin 1746), celui de la formule de développement, d'établir la relation entre excentricité et vitesse de rotation dans le cas d'une masse homogène. En 1743, Thomas Simpson (Market Bosworth, Leicestershire, 20 août 1710 Market Bosworth, 14 mai 1761), bien connu des étudiants d'analyse numérique pour sa méthode de calcul approché d'une intégrale définie, montre que pour une vitesse donnée, il existe deux ellipsoïdes de révolution qui sont figures d'équilibre; mais Jean Le Rond d'Alembert (Paris, 16 novembre 1717 -Paris, 20 octobre 1783), le fondateur de L'Encyclopédie avec Denis Diderot (Langres, 5 octobre 1713 -Paris, 31 juillet 1784), démontrera, en 1765, que l'un des deux ellipsoïdes est instable. Adrien Marie Legendre montre en 1784 que l'ellipsoïde est l'unique figure d'équilibre d'une masse fluide homogène tournant autour d'un axe si l'on suppose que sa surface extérieure est peu différente d'une sphère. Sa démonstration suppose que la surface libre du fluide est de révolution, une hypothèse que Pierre Simon de Laplace (Beaumont-en-Auge, 23 mars 1749 - Paris, 5 mars 1827) n'avait pas faite dans son travail de 1782 où il se limitait au terme du premier ordre par rapport à l'aplatissement. Puis Laplace prouvera, en 1799, qu'il n'y a pas d'autre figure d'équilibre que ces deux ellipsoïdes et qu'ils sont réels pourvu qu'une certaine condition reliant vitesse angulaire et densité soit satisfaite. En 1834, Cari Gustav Jacob Jacobi (Potsdam, 10 décembre 1804 - Berlin, 18 février 1851) démontre qu'un ellipsoïde à trois axes inégaux peut également être une figure d'équilibre et que, si l'on se donne arbitrairement deux des axes, le troisième ainsi que la vitesse de rotation sont complètement déterminés. Puis, en 1842, C.O. Meyer, un élève de Jacobi, établit que, pour une vitesse angulaire donnée, il existe, sous une certaine condition, un troisième ellipsoïde à axes inégaux.
Un problème important était de trouver le champ de gravité d'un tel ellipsoïde; il dérive d'un potentiel. La question suscita de nombreux travaux théoriques de Lagrange, Legendre et surtout Laplace qui montra, dans son monumental Traité de Mécanique Céleste en cinq volumes, parus entre 1799 et 1825, que ce potentiel vérifie une équation aux dérivées partielles, la célèbre équation de Laplace.
Mais, conjointement à ces travaux théoriques, il fallait également déterminer les paramètres de cet ellipsoïde terrestre.
En 1806, Legendre prit en considération dans ses calculs les latitudes astronomiques intermédiaires entre Dunkerque et Montjouy. Il obtint ainsi un système linéaire avec plus d'équations que d'inconnues qu'il résolut par la méthode des moindres carrés et trouva un aplatissement égal à 1/334. La justification de la méthode des moindres carrés comme procédure statistique est due à Carl Friedrich Gauss (Braunschweig, 23 avril 1777 - Göttingen, 22 février 1855) en 1809, puis en 1810 quand il en fait usage dans son Mémoire sur l'astéroïde Pallas découverte par Heinrich Wilhelm Olbers (Arbergen, 11 octobre 1758 - Bremen, 2 mars 1840) le 28 mars 1802. Selon lui la méthode des moindres carrés conduit à la meilleure combinaison possible des observations quelle que soit la loi de probabilité des erreurs. Elle fut immédiatement reconnue comme une contribution majeure. Gauss affirma l'avoir en fait déjà utilisée dès 1795. Ce qui est certain, c'est qu'il s'en servit en 1801 pour déterminer l'orbite de la comète Cérès découverte par Giuseppe Piazzi (Ponte di Valtellina, 6 juillet 1746 - Naples, 22 juillet 1826) le 1er janvier 1801. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette méthode des moindres carrés.
Après Legendre, les calculs furent repris par Delambre en 1810, puis par Henric Johan Walbeck (Abo, Suède, 11 octobre 1793 - Abo, 23 octobre 1822) en 1819 qui, en traitant les données provenant de l'arc du Pérou, des deux arcs indiens, des arcs français et anglais et de celui de Laponie et en négligeant les latitudes intermédiaires, obtint un aplatissement a=1/302.76. En 1841, Friedrich Wilhelm Bessel (Minden, 22 juillet 1784 - Könisgberg, 17 mars 1846) obtient a=1/(299.153±4.667), a=6 377 387 m et une longueur du quart du méridien égale à M/4=10 000 856 m. En 1848 George Biddell Airy (Alnwick, Northumberland, 27 juillet 1801 - Londres, 4 janvier 1892) trouva a=1/299.325. En 1859, Theodor Friedrich de Schubert (Saint Pétersbourg, 1779 - 1865) effectue des calculs en supposant un ellipsoïde avec trois axes inégaux. Le géodésien britannique Alexander Ross Clarke (Reading, 16 décembre 1828 - Reigate, Surrey, 11 février 1914), après un premier calcul avec une section méridienne non elliptique en 1866, revient au cas d'un ellipsoïde (dit de Clarke) avec a=1/293.465, a=6 378 180 m et M/4=10 001 871 m. Ce furent les valeurs adoptées à cette époque par le Service Géographique de l'Armée. Elles avaient été obtenues par la méthode des moindres carrés. Enfin, en 1874, Emmanuelle Fergola (1830 - 1915) fait l'hypothèse d'un ellipsoïde de révolution dont l'axe n'est pas confondu avec celui des pôles. Mais les incertitudes sur la position de l'axe de révolution étaient telles que cette hypothèse ne conduisit à aucune conclusion intéressante. À la fin du XIXè siècle, il faut mentionner les travaux du Général François Perrier (Valleraugue, Gard, 18 avril 1833 - Montpellier, 1888), X 1853, en France, d'O. Schreiber en Prusse, d'Alberto Ferrero della Marmora (Turin, 27 avril 1789 - 18 mai 1863) qui dressa une carte de la Sardaigne, de G. Zachariae au Danemark, de C. von Orff en Bavière et de Carlos Ibáñez de Ibero (Barcelone, 1825 - Nice, 1891) en Espagne.
Les écarts que présentent les résultats s'expliquent par les erreurs possibles dans les observations géodésiques et astronomiques. La Terre n'est pas un ellipsoïde de révolution parfait. Selon les arcs choisis pour les calculs on arrive à des résultats différents. Les écarts observés sont une manifestation de la déviation de la verticale.
Revenons maintenant à la chronologie. L'idée du système métrique, destiné à unifier les mesures, fut présentée par Talleyrand (1754 - 1838) à l'Assemblée Constituante en 1790. Il fallait décider de rattacher l'unité de longueur soit à la longueur d'un pendule dont la période était d'une seconde soit à une fraction du méridien. La Convention Nationale décida de déterminer la longueur exacte du méridien terrestre. Le mètre étalon, celui du fameux pavillon de Breteuil à Sèvres, serait la dix millionième partie du quart du méridien. Afin que cette définition puisse être acceptée sans discussion par l'ensemble des nations, il fallait donc mesurer de nouveau le méridien avec toute la précision voulue. Ce fut possible grâce aux progrès des instruments scientifiques.
Le travail fut confié à Jean Baptiste Joseph Delambre et Pierre Méchain (Laon, 16 août 1744 -Castellón de la Plana, Espagne, 20 septembre 1804) et fut réalisé entre 1792 et 1798.
Pierre François André Méchain avait découvert douze comètes et avait démontré qu'Uranus, découverte en 1781 par William Herschel (Hanovre, 15 novembre 1738 - Slough, Buckinghamshire, 25 août 1822), était une planète. Il était membre de l'Académie des Sciences depuis 1782. Méchain devait prolonger le méridien jusqu'à Barcelone. Le voyage jusqu'aux Pyrénées ne fut pas facile, car ses instruments étaient suspects aux yeux des comités révolutionnaires locaux. Sa triangulation est presque achevée quand l'Espagne et la France entrent en guerre. Il continue cependant ses mesures et les répète même plusieurs fois.
Emprisonné, puis autorisé à se rendre en Italie, Méchain se fixe à Gênes jusqu'en 1795. Il croyait ne pas avoir réussi à refermer exactement sa triangulation: il avait un écart de 3 secondes de degré entre les latitudes calculées pour un même point de Barcelone, selon que l'on s'appuie sur ce point ou sur la station de Monjuich, qui est distante de deux kilomètres. Méchain recommencera vainement ses calculs, refusera à son retour en France de communiquer ses dossiers afin que personne ne puisse s'apercevoir de son erreur, montrera un caractère assombri et anxieux, puis obtiendra (difficilement) une nouvelle mission sous le prétexte de prolonger le méridien jusqu'aux Baléares.
Entre temps, le 7 avril 1795 (18 germinal, an III), la Convention Nationale avait adopté le système métrique décimal et défini le mètre et le kilogramme. La définition du mètre était basée sur la mesure de Delambre et Méchain du méridien. Ils avaient effectué leurs mesures de longueur avec la règle bi-métallique platine/laiton de Jean Charles Borda (Dax, 4 mai 1733 - Paris, 19 février 1799) et celles des angles avec le théodolite à répétition de l'ingénieur Etienne Lenoir (Mer, Loir-et-Cher, 1744 -Paris, 1832). Ils avaient trouvé 551 584.7 toises, alors que la valeur mesurée en 1980 par des moyens beaucoup plus sophistiqués correspond à 551 589.3 toises, soit une erreur de 10 m sur 1000 km! Il en résulte que le véritable mètre est plus court que sa définition actuelle.
Méchain repart le 26 avril 1803, mais succombe à la fièvre jaune et à l'épuisement le 20 septembre 1804, à Castellón de la Plana au nord de Valence. L'écart de 3 secondes était dû au cumul de petits effets: déviations locales de la verticale, erreurs instrumentales, réfraction imprécise des étoiles basses. Il n'avait commis aucune erreur.
Après son décès, son fils Jérôme Isaac, qui était secrétaire de l'Observatoire, démissionna et la place fut offerte à un jeune Polytechnicien (X 1803) qui deviendra célèbre François Dominique Jean Arago (Estagel, 26 février 1786 - Paris, 2 octobre 1853). Celui-ci ne voulait pas renoncer à une carrière militaire qui l'attirait et dans laquelle il était assuré de la protection du Maréchal Lannes (1769 - 1809), ami de son père. Cependant, après une visite que lui firent Pierre Simon de Laplace et son collègue Siméon Denis Poisson (Pithiviers, 21 juin 1781 - Paris, 25 avril 1840), X 1798, il accepta à titre temporaire avec la promesse de pouvoir réintégrer l'artillerie s'il le désirait. Pour une fois, Laplace fut prévenant.
À l'Observatoire, Arago devint le collaborateur de Jean-Baptiste Biot (Paris, 21 avril 1774 -Paris, 3 février 1862), X 1794, et ils se livrèrent ensemble à des expériences sur la diffraction dans les gaz, ils déterminèrent des tables de réfraction atmosphérique et calculèrent le rapport entre le poids de l'air et celui du mercure. Mais leur idée était de continuer la mesure du méridien terrestre interrompue par la mort de Méchain. Laplace soutint leur projet et obtint les fonds nécessaires.
L'expédition scientifique se transforma en véritable épopée [voir livre de Pierre Bayart sur la Méridienne]. Ils partirent de Paris au début de l'année 1806 accompagnés du commissaire espagnol Rodriguez et de Chaix. Ils visitèrent les stations établies par Méchain et apportèrent quelques modifications à la triangulation. Fin novembre, Arago, seul, s'installa au Desierto de las Palmas près de Valence, en Espagne. La lumière du signal de Campvey, sur l'île d'Ibiza, ne se voyait que très rarement. Début octobre 1806, Monsieur Lanusse, le Consul de France, vint les avertir que l'Espagne avait déclaré la guerre à la France. Ils n'étaient plus en sécurité, il fallait se préparer à partir et à embarquer, dans quelques jours, sur un bâtiment américain qui viendrait s'ancrer à Valence. Mais l'ardeur belliqueuse, suscitée par la fausse nouvelle d'un désastre français en Prusse, se calma après l'annonce de la victoire d'Iéna, le 14 octobre 1806 et l'on fit semblant de croire que c'était contre le Portugal qu'était dirigée cette proclamation espagnole. Arago devait attendre l'arrivée de Biot à Valence. Les aventures se succèdent. Un jour, ayant été invité à prendre le thé par la fille d'un Français résidant à Valence, il eut à subir la jalousie d'un fiancé. Une autre fois, devant établir une station dans la montagne, il dut requérir la protection de la garde nationale et faire face à des brigands. Pour transporter ses instruments, il ne pouvait faire appel, à la fois, aux Aragonais, aux Valenciennois et aux Catalans qui se détestaient. Le récit d'Arago fourmille de détails et d'anecdotes qui nous montrent son sens de l'humour et, sans doute, de la dérision.
Arago se rendit à Majorque pour des mesures de latitude et d'azimut. Il était établi sur le Clop de Galazo, une montagne qui surplombait le port de Palma où débarqua Jayme el Conquistador qui allait enlever les îles Baléares aux Maures. Le bruit se répandit qu'Arago était là pour faire des signaux à l'armée française afin de favoriser son arrivée. Ces rumeurs devinrent plus menaçantes pour Arago lorsqu'arriva, le 27 mai 1808, un officier d'ordonnance de Napoléon. Arago dut se déguiser. Il voulait se réfugier sur le petit bateau que le gouvernement espagnol avait mis à sa disposition et dont le patron était un certain Damian. Mais devant le peu d'empressement et de coopération du capitaine du bateau, Manuel de Vacaro, et craignant pour sa vie, il demanda à être incarcéré au château de Belver. Après avoir échappé de justesse à la foule et avoir même reçu un léger coup de poignard à la cuisse, il arriva à Belver.
Ayant lu, dans l'un des journaux que lui apportait régulièrement son compagnon Rodriguez, le récit de sa propre exécution, il décida de s'évader. Rodriguez se mit immédiatement à l'œuvre et alla voir les autorités. Ne pouvant prévoir l'issue du soulèvement, le Capitaine-Général Vives préféra donner son accord à l'opération. Arago s'enfuit le 28 juillet 1808. Damian l'attendait sur la plage avec une embarcation dans laquelle il avait réuni les instruments de prix de la station géodésique. Le lendemain, Arago et Berthemie faisaient voile vers Alger où ils arrivèrent le 3 août. Le débarquement s'agrémenta bien de quelques péripéties supplémentaires mais les fugitifs finirent pas être reçus par le Consul de France, Dubois-Thainville, qui leur procura de faux passeports et s'occupa de leur trouver des places sur un bâtiment qui devait appareiller pour Marseille le 13 août. Au moment du départ, le capitaine vit que le Dey l'observait de sa terrasse. Craignant une punition s'il tardait à mettre la voile, il compléta son équipage en enrôlant à la hâte des curieux qui n'étaient même pas marins. Il est important, pour la suite du récit, de mentionner que deux lions que le Dey d'Alger envoyait à Napoléon étaient du voyage.
En face de Cagliari, ils rencontrèrent un bâtiment américain dont le capitaine leur causa quelques soucis. Cependant tout se passa bien jusqu'au moment où, le 16 août, alors qu'ils approchaient de Marseille, ils furent faits prisonniers par un corsaire espagnol. Arago reconnut, parmi l'équipage, un homme qui avait été son domestique et qui avait été un matelot de Manuel de Vacaro, le capitaine de Palma de Majorque qui lui avait causé tant de problèmes. Son faux passeport ne lui servait plus à rien et il resta caché, la tête enveloppée d'une couverture, jusqu'à Rosas où ils furent débarqués. Le juge qui l'interrogea ne réussit pas à découvrir sa véritable nationalité ni son identité, Arago ayant même été jusqu'à chanter une chanson dans le dialecte d'Ibiza pour brouiller les pistes. Voyant qu'il ne s'était pas laissé intimider, les Arabes, les Marocains et les Juifs qui avaient assisté à la scène, lui demandèrent de les aider dans leurs réclamations auprès du gouvernement espagnol.
Après quelques épisodes supplémentaires, Arago et Berthemie se retrouvèrent à la forteresse de Rosas. Puis la ville de Rosas étant tombée aux mains des Français, les prisonniers furent transférés dans le fort de la Trinité le 25 septembre 1808, puis à Palamos le 17 octobre. On les laissait aller à terre quelques heures par jour et Arago fit ainsi la connaissance de la Duchesse d'Orléans, mère de Louis-Philippe, qui avait quitté sa résidence de Figueras bombardée par les Français. Des juges vinrent de Girone pour interroger les prisonniers. Ceux-ci furent bien surpris quand, le lendemain, on leur annonça qu'ils étaient libres. C'était grâce aux lions. En effet, quelque temps auparavant, Arago avait écrit au Dey d'Alger pour l'informer de l'arraisonnement illégal de son bateau et de la mort de l'un des lions destinés à l'Empereur. Le Dey devint furieux. Il convoqua sur le champ le Consul d'Espagne, demanda des dédommagements financiers pour son lion et menaça d'une guerre si on ne lui rendait pas son bâtiment. Les Espagnols cédèrent et relâchèrent même leurs prisonniers.
Le 28 novembre 1808, ceux-ci mettaient de nouveau le cap sur Marseille. Mais un coup de mistral d'un extrême violence les dérouta et ils se retrouvèrent, le 5 décembre, à Bougie en Algérie. Arago et Berthemie voulaient se rendre à Alger par mer mais on ne leur en donna pas l'autorisation à cause des dangers que cela représentait. Les deux Français se déguisèrent et partirent à pied sous la conduite de plusieurs matelots. Ils arrivèrent à Alger, après, bien entendu, quelques autres aventures pour pimenter le trajet, le 25 décembre 1808.
Entre temps, le Dey avait été décapité et son successeur étranglé avant même d'avoir été intronisé. Arago et Berthemie restèrent plusieurs mois à Alger. On leur réclamait une somme énorme pour les laisser partir. Après de nombreuses tractations, ils s'embarquèrent finalement pour la France le 21 juin 1809 et arrivèrent à Marseille le 2 juillet. Ils furent mis en quarantaine au lazaret de Marseille. C'est là qu'Arago reçut la première lettre d'Alexandre von Humboldt (Berlin, 14 septembre 1769 - Postdam, 6 mai 1859), le célèbre voyageur et naturaliste allemand qui, sans le connaître, lui offrait son amitié. Celle-ci jouera un grand rôle dans la vie des deux hommes. Après le temps réglementaire au lazaret et un passage dans sa famille à Perpignan, Arago rejoignit Paris et déposa au Bureau des Longitudes et à l'Académie des Sciences le résultat de ses observations qu'il avait réussi malgré tout à conserver. Quand il revint de son expédition, qui avait duré trois ans, Arago était un héros. Des plaques, apposées sur les trottoirs de Paris le long du méridien sont d'ailleurs là pour rendre hommage à ce travail.
À cette époque, la France était manifestement en tête des nations pour les progrès de la géodésie. De nombreux officiers géographes étaient au service de l'armée napoléonienne. Ils avaient établi des cartes des régions parcourues. Citons parmi eux Henry, Jean Baptiste Mathurin Brousseaud (Limoges, 8 novembre 1776 - 16 novembre 1840) qui participa aux campagnes de l'Empire comme ingénieur géographe, Delcros et Jean-Baptiste Coraboeuf (Nantes, 22 avril 1777 - 1859), X 1794. Les instruments avaient été perfectionnés.
L'exemple français allait être suivi par de nombreux pays comme le rapporte Delambre en 1810. Les travaux de triangulation commencent en Angleterre au XVIIIè siècle avec le Général William Roy (Miltonhead, South Lanakshire, 4 mai 1726 - Londres, 1er juillet 1790). En 1787, Jean-Dominique Cassini (Paris, 30 juin 1748 - Thury, 18 octobre 1845), le fils de César-François Cassini de Thury, propose de relier géodésiquement les observatoires de Paris et de Greenwich. Ce fut fait de 1787 à 1790. Le travail fut continué par William Mudge (1762 - 1820) et H. James. Aux Indes, William Lambton (Grosby Grange, Yorkshire, 1756 - Hingan-ghat, Inde, 1823) et George Everest (Gwernvale, Brecknockshire, 4 juillet 1790 - Londres, 1er décembre 1866) entreprennent la mesure d'un arc de 21° allant du Cap Comorin, tout au sud du pays, à l'Himalaya; cela dura de 1800 à 1842.
En Prusse, les premières mesures datent de 1805. En 1820, Gauss se tourna vers la géodésie. Il y consacrera huit ans. Devenu conseiller des gouvernements du Hanovre et du Danemark, il fut chargé de réaliser un relevé du Hanovre par triangulation. Il inventa l'héliotrope, un appareil qui réfléchit les rayons du Soleil dans une direction bien déterminée et permet un alignement très précis des instruments de mesure sur de longues distances. Il effectua ainsi la mesure de l'arc entre Göttingen et Altona. La mesure de l'arc de la Prusse orientale et la triangulation côtière furent effectuées en 1838 par Friedrich Wilhelm Bessel et son élève Johann Jakob von Baeyer (Muggelsheim-bei-Kôpernik, 1794 - Berlin, 1885). Ils utilisèrent la méthode des directions de Friedrich Georg Wilhelm von Struve (Altona, 15 avril 1793 - Saint-Pétersbourg, 23 novembre 1864), le directeur de l'observatoire de Dorpat, et un appareil dû à Bessel pour mesurer la longueur de la base.
En Russie, le français Joseph Nicolas Delisle (Paris, 4 avril 1688 - Paris, 11 septembre 1768) avait été appelé par Pierre le Grand dès 1726; mais ce fut Struve qui entreprit la mesure d'un arc de 25°20' allant du Danube à la Mer Baltique. Les travaux durèrent de 1816 à 1850. Au Danemark, Heinrich Christian Schumacher (Bramstedt, Holstein, 3 septembre 1780 - Altona, 28 décembre 1850) et G.G. Andrae doivent être mentionnés pour leur mesure de l'arc de méridien entre Skagen et Lauenburg qui date de 1867.
On s'aperçut rapidement que les données disponibles étaient insuffisantes pour résoudre définitivement les problèmes posés par la géodésie. Il était nécessaire d'étendre le réseau des triangulations à la Terre entière. L'Association Géodésique Internationale fut fondée à Berlin en 1864. Il fallait non seulement mesurer la longueur des arcs méridiens à différentes latitudes, mais aussi mesurer les arcs de parallèles. On avait également remarqué qu'en certains endroits le fil à plomb était dévié de la position qu'il devrait occuper si la Terre avait été un corps homogène, et que cette déviation n'était pas toujours le fait de masses montagneuses. Ce constat conduisit à chercher si les anomalies constatées ne seraient pas dues à des dépôts de métaux plus denses que la Terre ou à de grandes cavités. Les préoccupations de la géodésie rejoignaient celles de la géologie.
Dans un mémoire lu à l'Académie des Sciences, Louis Puissant, qui dominait alors la géodésie française, avait déclaré en 1836 que Delambre et Méchain avaient commis une erreur dans la mesure de la Méridienne. L'Observatoire de Paris fut ainsi conduit à déléguer l'astronome et mathématicien Antoine François Joseph Yvon Villarceau (Vendôme, 16 janvier 1813 - Paris, 23 décembre 1883), de 1861 à 1866, pour vérifier les opérations géodésiques en huit points de la Méridienne de France, au moyen de déterminations astronomiques de longitudes, de latitudes et d'azimuts. Quelques-unes des erreurs dont étaient entachées les opérations de Delambre et Méchain furent alors corrigées. En 1870, François Perrier fut chargé de reprendre la triangulation entre Dunkerque et Barcelone. Il utilisa de nouveaux instruments, construits par Emile Brunner (1834 - 1895), pour mesurer les angles et détermina les différences de longitudes au moyen de signaux électriques. De 1870 jusqu'à sa mort, il dirigea les opérations. Elles furent terminées en 1879 entre Perpignan et Melun. Il s'employa aussi au rattachement de l'Espagne à l'Afrique du Nord. La triangulation du premier ordre de l'Algérie et de la Tunisie fut terminée en 1902. À la veille de la première guerre, celles de second et de troisième ordre étaient complétées. André Cholesky (Montguyon, Charente Maritime, 15 octobre 1875 - Bagneux, Aisne, 31 août 1918), X 1895, y avait pris part.
En 1899, l'Association Géodésique Internationale envoie dans les Andes une équipe pour reprendre les mesures du Pérou. Cette équipe, détachée du Service Géographique de l'Armée et dirigée par le Général Joseph Emile Robert Bourgeois (Sainte-Marie-aux-Mines, 1857 - Paris, 1945), X 1876, et le Général Georges Perrier (Montpellier, 28 octobre 1872 - 16 février 1946), X 1892, le fils du Général François Perrier, y restera sept ans. Signalons que le Général Bourgeois deviendra directeur du Service Géographique de l'Armée en 1911 et aura Cholesky sous ses ordres. C'est Bourgeois qui organisera les canevas de tir et les sections topographiques pendant la guerre et créera les sections de repérage des batteries ennemies par le son.
Entre temps, en 1906, John Fillmore Hayford (Rouse Point, New York, 19 mai 1869 - Evanston, Illinois, 10 mars 1925), calculateur au Coast and Geodesic Survey aux États-Unis, avait précisé le principe d'isostasie, du grec isos: égal et statis: arrêt). Il avait été mis en évidence par Pierre Bouguer lors de l'expédition du Pérou de 1736 à 1743 en se fondant sur la trop grande différence de pesanteur entre les sommets des Andes et le niveau de la mer. La densité des masses devaient perturber la pesanteur et donner lieu à des déviations de la verticale. Selon le principe d'isostasie, déjà étudié par George Bidell Airy en 1855 et indépendamment par John Henry Pratt (Londres, 4 juin 1809 - Ghazipur, 28 décembre 1871) en 1856 à titre d'hypothèse, il doit exister un état d'équilibre isostatique entre la couche superficielle rigide de l'écorce terrestre et la couche profonde visqueuse sur laquelle elle repose. Cet équilibre est réalisé à un niveau dit profondeur de compensation pour lequel la pression de charge est identique en tout point. C'est, en fait, le principe d'Archimède. En utilisant les données géodésiques américaines et en décomposant la croûte terrestre en prismes, Hayford estima cette profondeur à 120 km. Il en déduisit l'ellipsoïde donnant l'écart le plus faible pour les déviations de la verticale. Son aplatissement était de 1/297, corrigé en 1917 en 1/297.3, valeur universellement adoptée en 1924 pour un demi-siècle. L'isostasie sera désormais l'un des fondements de la géophysique.
À côté des grandes institutions et des corps spéciaux, il faut signaler le travail d'un amateur, Paul Helbronner (24 avril 1871 - 18 octobre 1938), X 1892, qui, de 1903 à 1928, refit seul et sans aucun appui officiel toute la triangulation des Alpes françaises et réussit le rattachement géodésique de la Corse à la Provence (280 km) à l'aide de signaux optiques.
Il restait à unifier les modes de représentation géodésiques. C'est ce que firent le Mexique, le Canada et les États-Unis en 1927. Mais ce n'est qu'après la seconde guerre mondiale que l'essentiel du travail sera accompli. Cependant, à l'heure actuelle, on n'est pas encore parvenu à une unification complète et trois ou quatre systèmes différents subsistent.
À l'opposé, la gravimétrie prit un essor extraordinaire: dans un premier temps, grâce au perfectionnement des techniques classiques, puis, à partir des années 1960, grâce aux techniques spatiales. Le champ de pesanteur terrestre est mesuré et cartographié avec une grande précision. On peut aussi étudier son évolution au fil du temps. Bien entendu, la géodésie a énormément progressé avec les satellites artificiels et l'informatique. La géodésie spatiale permet de mettre en évidence les mouvements verticaux de l'écorce terrestre aussi bien que les déplacements horizontaux des plaques tectoniques. Plusieurs branches de la science se complètent ainsi mutuellement.
Le géoïde terrestre est voisin d'un ellipsoïde de révolution. Il est aplati aux pôles avec un taux de 1/298.5. Le rayon polaire est de 6356.752 km, plus court de 21 km environ que le rayon equatorial, égal à 6378.136 km. La circonférence méridienne est de 40007.864 km, plus courte de 67 km environ que la circonférence équatoriale qui est de 40075.017 km. La superficie de la Terre est de 510 065 000 km carrés, dont 133 620 000 km carrés de continents, soit 26.2 %.
Le volume de la Terre est de 1 083 320 000 km cubes, ce qui donne une masse de 5.98 1024 kg et une densité moyenne de 5.515.
Par rapport à un ellipsoïde de révolution qui aurait pour axe la ligne des pôles, le géoïde présente des saillies et des dépressions d'une centaine de mètres au maximum. Les deux plus grandes protubérances, d'une amplitude maximale de 80 m, se situent dans le sud-ouest du Pacifique, vers la Nouvelle-Guinée, et dans l'Atlantique nord, approximativement aux antipodes l'une de l'autre. La plus grande dépression, d'une amplitude de 100 m environ, se situe dans l'océan Indien, au sud de l'Inde. Des protubérances et des dépressions moins importantes existent. Leur distribution n'est pas liée à des structures superficielles déterminées mais à des irrégularités dans la répartition des masses à l'intérieur de la Terre et fait encore l'objet de conjectures.
Deux grandes ceintures montagneuses ont été identifiées grâce aux satellites: l'une péripacifique, à prédominance méridienne, l'autre latitudinale, des Caraïbes à l'Indonésie. Mais la plus grande chaîne est formée par les rides médio-océaniques; elle s'élève en moyenne à 2000 m au-dessus des plaines abyssales et est longue de 60 000 km (elle contourne les continents). Par rapport au géoïde, l'altitude maximale des terres émergées est celle de l'Everest (8846 m) et la profondeur maximale des océans se situe dans la fosse des Mariannes (11034 m) dans le Pacifique occidental.
La topographie semble être née du besoin, en Egypte et en Babylonie, d'établir des plans de propriétés terriennes. Les Grecs utilisaient le niveau, la mire, la chaîne et savaient mesurer les angles, mais ils ne firent guère progresser la topographie. Quand Cassini de Thury publia sa carte de France au 1/86400 les techniques n'avaient que peu évolué.
Le problème majeur auquel est confronté le topographe est l'impossibilité de représenter de façon rigoureusement correcte le géoïde terrestre sur un plan. Il faut donc commencer par définir une correspondance entre les points de la Terre et ceux de sa représentation plane: c'est la notion de système de projection. Comme la Terre n'est pas une surface développable sur un plan, cette projection donne nécessairement lieu à des déformations.
Une autre notion essentielle en topographie est celle d'échelle d'une carte. Si 1 cm sur la carte en représente n sur le terrain, on dit que la carte est au 1/n. Plus l'échelle est grande et plus peuvent y être portés de petits détails. Plus l'échelle est petite et plus il est fondamental de tenir compte de la rotondité de la Terre. Il faut que la projection soit la plus précise possible. Selon l'échelle, les méthodes de projection peuvent ainsi différer.
Commençons par des définitions. On appelle conforme une projection qui conserve les angles. On parle de projection équivalente lorsque ce sont les surfaces qui restent les mêmes. Une projection équivalente ne peut être conforme. Lorsque les distances à partir d'un point donné sont conservées, il s'agit de projection équidistante. Les projections les plus utilisées sont les projections conformes à cause de l'importance des angles dans les opérations de mesure. Cependant, à petite échelle, on utilise souvent une projection équivalente. Une projection qui n'est ni conforme, ni équivalente ni équidistante est dite aphylactique. Mais, dans tous les cas, aucune projection ne peut conserver toutes les distances.
Une autre manière d'aborder les différents systèmes de projection est de s'intéresser à leur canevas, c'est-à-dire à l'image des méridiens et des parallèles. On les classe ainsi en trois catégories principales: coniques, cylindriques et azimutales.
Dans une projection conique, on projette sur un cône tangent à un parallèle de la sphère terrestre et dont l'axe passe par les pôles. Les images des méridiens sont des demi-droites qui concourent en un point qui est l'image du pôle et les parallèles sont des arcs de cercle concentriques et équidistants autour de ce point.
La projection de Bonne remonte à 1520. Elle a été définie de façon rigoureuse par l'ingénieur hydrographe Charles-Marie Rigobert Bonne (1727 - 1795). Elle est utilisée dans la carte d'Etat-Major au 1/80000 de la France. C'est une projection pseudo-conique équivalente. Les méridiens ne sont pas des droites concourantes, mais les parallèles sont des arcs de cercle concentriques équidistants dont le centre est situé à une extrémité du méridien central. Les altérations d'angles et de longueurs augmentent rapidement quand on s'éloigne du méridien central et du parallèle d'origine.
La projection conique conforme du mathématicien Johann Heinrich Lambert (Mulhouse, 26 août 1728 - Berlin, 25 septembre 1777) date de 1772. C'est, de loin, la plus importante. Les surfaces sont conservées le long de tous les parallèles. Elle a d'abord été introduite dans l'armée pour plus de commodité dans les tirs d'artillerie. Ce système de projection est très utilisé pour dresser les cartes des régions nordiques, telles que celles du Canada et des États-Unis. Ainsi, il y a moins de distorsion de l'ensemble du territoire. Cette projection est également à la base de la cartographie française à grande échelle (carte de France au 1/25000).
Une projection tronconique équivalente est celle d'Heinrich Christian Albers (Altona, 1773 - 1833) en 1805. Le pôle est représenté sous la forme d'un petit arc de cercle, car il n'est pas le centre de la projection. On peut l'améliorer en encadrant la région à cartographier par deux parallèles de contact appelés fondamentaux ou standards. Ce type de projection est très utilisé parce qu'il déforme très peu les détails situés près du centre de la carte (par exemple, la carte au 1/25000 des USA).
Les projections cylindriques sont réalisées en enfermant la Terre dans un cylindre tangent à l'équateur. Les méridiens sont représentés par des droites verticales équidistantes et les parallèles par des droites horizontales. Plus on s'éloigne de l'équateur et plus les distances sont amplifiées. Les zones polaires sont donc fortement disproportionnées et distordues, mais on retrouve sur la carte les proportions qui sont celles des régions dans la réalité. Ce type de carte est très utile pour la navigation car le chemin le plus direct (c'est-à-dire à cap constant) entre deux points est donné par la droite qui les joint, appelée ligne de rumb puis loxodromie à partir du XVIIè siècle (du grec loxos, oblique, et dromos, course). C'est cette propriété qui en fit le succès. Quand un navire suit la ligne de rumb, il rencontre tous les méridiens sous un angle constant. Le mathématicien portugais Pedro Nuñes (Alcácer do Sal, Portugal, 1502 - Coimbra, 11 août 1578) publia des tables qui fournissent la longitude et la latitude d'un bateau le long du rumb. La loxodromie ne fournit pas le chemin le plus court; c'est l'orthodromie qui le donne. Le chemin le plus court passe plus au nord dans l'hémisphère Nord et plus au sud dans l'hémisphère Sud, il suit un grand cercle du globe. Ainsi, entre le Cap Horn et le Cap de Bonne Espérance, la différence entre les deux routes est de 370 km. C'est aussi pour cela qu'un voyage entre l'Europe et l'Amérique du Nord passe près des zones de dérive des icebergs.
La plus célèbre des projections est celle de Mercator (Rupelmonde, 1512 - Duisburg, 1594), mathématicien et géographe flamand, Gerhard Kremer de son vrai nom (en allemand Krämer signifie "petit commerçant"). Elle s'apparente, avec quelques modifications, à une projection cylindrique. Il commença à y travailler en 1538. Son but était de représenter par une droite la trajectoire d'un navire gardant un cap constant. Il était naturel de dessiner des parallèles équidistants et perpendiculaires aux méridiens, comme c'est le cas sur une sphère. Restait à calculer à quelle latitude se trouvait chacun de ses parallèles. Mercator utilisa l'idée qu'un plan tangent à une sphère s'en écarte peu sur de petites distances et calcula de proche en proche, par des formules de trigonométrie simples, la latitude de chaque parallèle s'il se déplaçait en suivant un cap de 45 degrés. Mercator ne dévoila jamais le raisonnement qui l'avait conduit à sa méthode et celle-ci ne fut expliquée qu'en 1599 par Edward Wright (Garveston, octobre 1561 - Londres, novembre 1615). Du point de vue mathématique, elle se ramène au calcul d'une intégrale définie et fait appel à la fonction logarithme. Mais calcul intégral et fonction logarithme étaient inconnus à l'époque. De nos jours, la projection de Mercator est toujours utilisée quand la représentation des surfaces est de peu d'importance, comme c'est le cas pour les liaisons entre continents, et que l'on veut mesurer facilement la distance entre deux points.
Lambert eut également l'idée d'une projection de Mercator dans laquelle les rôles de l'équateur et d'un méridien sont échangés. C'est la projection cylindre de Lambert que l'on l'appelle aujourd'hui la projection de Mercator transverse, ou UTM (Universal Transverse Mercator). Elle facilite la représentation des pays qui s'étendent beaucoup en latitude mais pas en longitude, comme c'est le cas pour le Chili par exemple. Elle est également utile pour les vols passant près du pôle. Mais son utilisation fondamentale est la cartographie de l'ensemble de la planète à l'exception des pôles selon un découpage en fuseaux. Cette projection s'adapte parfaitement à un ellipsoïde.
C'est une projection sur un plan tangent au globe en n'importe quel point. Lorsque ce point est le pôle, les images des méridiens sont des demi-droites qui concourent en l'image du pôle et les parallèles sont des cercles concentriques autour de ce point. On distingue les projections planes de type gnomonique, orthographique et stéréographique. La projection gnomonique correspond à des rayons projetés du centre de la Terre. Dans une projection orthographique, la source des rayons se situe à l'infini et les cartes conçues selon ce procédé donnent l'impression que la Terre a été photographiée depuis l'espace. Dans le cas d'une projection stéréographique, la source des rayons est le point diamétralement opposé au point de contact de la sphère terrestre et du plan sur lequel est réalisée la projection.
La nature de la projection varie selon la source des rayons. Ainsi, la projection gnomonique couvre des zones plus petites qu'un hémisphère alors que la projection orthographique couvre les hémisphères; la projection azimutale équivalente et la projection stéréographique correspondent à des zones plus larges, et la projection azimutale équidistante concerne le globe tout entier. Dans tous ces types de projection (à l'exception de la projection azimutale équidistante), la partie de la Terre qui apparaît sur la carte dépend du point de contact du plan imaginaire avec la Terre: une carte de projection plane dont le plan est tangent à la surface de la Terre au niveau de l'équateur représente la zone de l'équateur, mais ne peut pas figurer toute la région sur une même carte; si le plan est tangent à l'un des pôles, la carte représente les régions polaires.
Dans la mesure où la source de la projection gnomonique est au centre de la Terre, tous les grands cercles sont représentés par des droites. Un grand cercle qui relie deux points sur la Terre correspond toujours à la distance la plus courte entre ces deux points. C'est pourquoi la carte gnomonique est très utile pour la navigation quand elle est utilisée avec la carte de Mercator.
La projection stéréographique est la plus ancienne connue. Elle correspond à la carte plate « parallélogrammatique » d'Hipparque qui inventa la première projection de l'histoire, lointaine ancêtre de celle de Mercator. Elle est conforme. De toutes ces projections, c'est la seule qui ne fausse pas les formes.
La projection azimutale équidistante de Guillaume Postel (1510 - 1581) n'est ni équivalente ni conforme. Les coordonnées sont courbes. La distance et la direction sont exactes à partir du point central, ce qui la rend très appréciée en navigation. En vue polaire, les méridiens et les parallèles sont divisés de manière à préserver l'équidistance. Toutes les formes sont faussées, sauf au centre, et la déformation s'accroît au fur et à mesure que l'on s'éloigne du centre. Les projections en vue polaire sont les mieux adaptées pour les régions de grandes latitudes car on peut aller jusqu'au 51è parallèle avec une déformation de seulement 15%. C'est ainsi que la carte se trouvant sur le drapeau de l'ONU représente le monde en projection azimutale équidistante centrée sur le Pôle Nord.
En 1772, Johann Heinrich Lambert proposa une projection azimutale équivalente. Dans sa version polaire, les méridiens sont rectilignes et concourants. L'espacement des parallèles a été calculé de façon que la surface de toutes les mailles du réseau soit identique. La déformation s'accroît radialement et les formes sont aplaties dans le sens des parallèles. On peut aller jusqu'à 42 degrés du centre avec moins de 15% de déformation. Cette projection est utilisée, lorsqu'elle est centrée sur le pôle ou sur un point de l'équateur, pour des densités de population, des frontières politiques et des cartes océaniques ou thématiques.
Un certain nombre d'autres projections ont été développées pour figurer dans le détail des zones importantes à une petite échelle. Fondées sur des calculs mathématiques, ces cartes représentent la Terre entière selon des cercles, des ellipses ou d'autres formes. Dans le cas de cartes spécialisées, la Terre est souvent dessinée en ne suivant pas la forme originale de la projection, mais avec des parties jointes et irrégulières. Les cartes de ce type sont appelées projections interrompues et comprennent les six projections équivalentes présentées à partir de 1906 par Max Eckert (1868 - 1938) et celle de John Paul Goode (Stewartville, 1862 - 1932) qui date de 1916.
Le travail du topographe sur le terrain se décompose en triangulation et en nivellement.
En premier, il faut choisir les points géodésiques primordiaux qui serviront à la triangulation. Les points obtenus par triangulation sont reportés sur un canevas et forment un réseau. Ils doivent être facilement repérables comme des sommets, des tours ou des clochers.
À cause des accidents de terrain, il est plus facile et plus précis de mesurer des angles que des longueurs. C'est ce qui fait l'avantage de la triangulation. De plus les angles ne dépendent pas de l'altitude des points. Ce sont les mesures géodésiques. On commence par mesurer l'un des côtés du premier triangle avec le maximum de précision. Les deux points de départ doivent donc être situés, si possible, sur un terrain plat et uni. Il s'agit d'arpentage. Puis on mesure les angles entre les différents points du réseau à l'aide d'une alidade à pinnules. L'alidade est un instrument employé pour viser et tracer des directions. Il a été inventé par Archimède, au IIIè siècle. Il comporte une règle avec deux pinnules qui pivote sur un cercle gradué et est montée sur la planchette d'un goniographe. La règle comporte un biseau gradué le long duquel on trace le trait qui correspond à la direction de l'objet pointé. Afin de limiter les incertitudes, les angles ne doivent pas être trop petits. À partir de la longueur d'un côté et des deux angles adjacents, la trigonométrie nous apprend qu'il est possible de calculer la longueur des deux autres côtés du triangle ainsi que le troisième angle. De proche en proche, on obtient ainsi les angles et les côtés de tous les triangles.
Comme les sommets des triangles ne sont pas situés à la même hauteur, les triangles sont inclinés. Il est alors nécessaire des les ramener à l'horizontale en mesurant l'angle que fait chaque côté avec la verticale. C'est le nivellement qui s'effectue à l'aide de mesures zénithales. Puis, si l'échelle de la carte le nécessite, il faut tenir compte de la forme de la Terre et faire appel à la trigonométrie sphérique.
Enfin, il faut orienter la carte par rapport au Nord, c'est-à-dire qu'il faut mesure l'angle, l'azimut, que les côtés font avec le méridien. Il s'agit de mesures astronomiques.
Les points de la triangulation doivent être répartis de façon la plus homogène possible afin, d'une part, de pouvoir servir à n'importe quelle utilisation ultérieure et, d'autre part, de faciliter la vérification des mesures. Dans chaque triangle, il est souvent possible de mesurer plus que deux angles et la longueur d'un côté. On peut ainsi se mettre à l'abri d'erreurs et augmenter la précision des résultats. De cette façon, on obtient des mesures surabondantes. Si les triangles faisant l'objet de ces mesures surabondantes ne se referment pas, on choisit pour chaque sommet le point qui correspond le mieux à l'ensemble des mesures et l'on détermine les corrections à apporter aux angles mesurés; c'est la compensation des réseaux. On obtient ainsi un système linéaire avec plus d'équations que d'inconnues (ou inversement selon les inconnues que l'on considère) et on le résout par la méthode des moindres carrés dont il a été question plus haut. C'est ainsi que le cartographe belge Guillaume Adolphe Nerenburger (1804 - 1869) eut à résoudre un système de 60 équations à 22 inconnues. Pour compenser ses réseaux, Bessel traita un système de 31 équations à 70 inconnues et Baeyer 47 puis 86 équations de condition. Pour traiter de tels systèmes, on recherche des méthodes efficaces, rapides et facile à utiliser sans formation mathématique poussée. Après un certain nombre de tentatives, la méthode de résolution qui s'imposa fut celle qu'André Louis Cholesky inventa en 1910. À l'heure actuelle, c'est toujours la plus utilisée pour résoudre de tels systèmes.
Si l'on veut réaliser une carte plus précise, le réseau devra être affiné par des triangulations plus petites. À partir des premiers points mesurés, on établit une triangulation interne plus précise, dite du second ordre, puis une triangulation du troisième ordre et ainsi de suite jusqu'à obtenir la précision désirée pour les détails de la carte.
La densité des points doit aller de pair avec une bonne conformation des triangles. Les angles ne doivent être ni trop petits ni trop grands pour éviter des pertes de précision dans les mesures. La solution idéale serait constituée de triangles tous équilatéraux ce qui est naturellement impossible à réaliser en pratique. Il faut cependant s'en approcher le plus possible.
Le nivellement consiste à mesurer l'altitude des points par rapport au géoïde afin de tracer des courbes de niveau.
Les mesures de nivellement remontent à l'Antiquité. Le fil à plomb était l'instrument indispensable. On doit au Roi de Juda Ezéchias (716 - 688 av. J.-C.) l'aqueduc entièrement souterrain de Siloé, construit en 701 av. J.-C. à Jérusalem. En forme de S, il est long de 512 mètres pour une dénivellation de 10 mètres. Vers 550 avant J.-C, l'architecte grec Eupalinos construisit un tunnel de 1036 mètres de long pour apporter l'eau depuis les montagnes jusqu'à la ville de Samos. Deux équipes de deux hommes progressaient l'une vers l'autre et l'exploit est qu'elles se soient rencontrées. Les Romains construisirent de nombreux autres aqueducs ainsi que des égouts, prouvant ainsi leur maîtrise des techniques de nivellement.
Le niveau utilisé par les Romains, le chorobate, était constitué par une poutre terminée en équerre et munie de fils à plomb aux extrémités et sur les côtés. Un canal y était creusé et l'eau devait y affleurer sur toute sa longueur pour que l'instrument soit nivelé. On lisait probablement la différence de niveau à l'aide de règles graduées fixées aux extrémités. C'est l'ancêtre du niveau à bulle qui date du milieu du XVIIè siècle.
Le niveau à eau restera longtemps l'instrument privilégié, sinon unique, du nivellement. Il est constitué de deux tubes verticaux transparents, ouverts, et qui communiquent par un tube horizontal rigide. Il est rempli d'un liquide coloré et la ligne des deux affleurements donne l'horizontale. Le canal du Midi et celui de Briare, construits par Pierre Paul Riquet (Béziers ?, 29 juin 1604 - Toulouse, 1er octobre 1680) à partir de 1666, furent sans doute nivelés de cette manière.
Mais le premier à vraiment maîtriser les techniques de nivellement fut Jean Picard. Ses travaux furent exposés par son disciple Philippe de La Hire dans son Traité du Nivellement. La Hire y fait mention d'une méthode de double nivellement réciproque de deux stations lorsqu'il est impossible de stationner entre elles, peut-être le prélude de la méthode de cheminement double que Cholesky mettra au point en 1910 lors de ses travaux en Afrique du Nord. Picard est également à l'origine du nivellement indirect qui consiste à utiliser les distances zénithales pour calculer la différence d'altitude entre deux points. La technique fut reprise par d'autres mais les résultats étaient médiocres. Cassini de Thury explique que c'est la réfraction atmosphérique qui empêche que les calculs soient exacts. Ce sera Delambre qui trouvera la correction à apporter. Cependant, à l'époque de la Méridienne, on ne disposait pas d'assez d'éléments pour mener une discussion scientifique satisfaisante sur la question. En effet, la dilatation des gaz parfaits ne sera étudiée qu'après 1800 par Louis Joseph Gay-Lussac (Saint-Léonard de Noblat, 6 décembre 1778 - Paris, 9 mai 1850), X 1797. La pesanteur n'étant pas la même à toutes les altitudes, on eut aussi recourt à des mesures barométriques de nivellement. Mais le nivellement géométrique de précision est l'œuvre de Paul-Adrien Bourdaloue (Bourges, 1798 - 1868). Après avoir travaillé sur le nivellement des voies ferrées entre Nîmes et les mines des Cévennes, il fut chargé du nivellement de la zone du canal de Suez. Puis il procéda au nivellement de la France et mit en place, entre 1857 et 1863, un réseau de 15000 repères en fonte scellés pour le tracé des courbes de niveau.
Dès 1850, Aimé Laussédat (Moulins, 19 avril 1819 - Paris, 18 mars 1907), X 1838, officier et professeur suppléant à l'École Polytechnique, se sert de photographies pour s'aider dans ses relevés topographiques. Ses procédés sont améliorés en 1901 par l'opticien allemand Carl Pulfrich (Strässchen, 24 septembre 1858 - Ostsee, 12 août 1927) en se servant de deux photographies et de son stéréocomparateur. L'autrichien Eduard Ritter von Orel (Triest, Autriche, 5 novembre 1877 - Bozen, 24 octobre 1941) y ajoutera en 1911 un mécanisme permettant le tracé continu des courbes de niveau et des détails observés sur les couples de photographies. Puis, en 1919, l'ingénieur Georges Poivilliers (Draché, Indre-et-Loire, 15 mai 1892 - Neuilly-sur-Seine, 9 mars 1968) construisit une machine qui restituait parfaitement le terrain à partir de vues stéréoscopiques prises d'avion. Le relais viendra, à partir de 1957, avec les satellites artificiels.
Mais toutes ces mesures doivent être constamment recommencées à cause des mouvements de l'écorce terrestre.
Les plus anciennes cartes ont été réalisées par les Babyloniens en 2300 avant J.-C. Elles étaient tracées sur des carreaux d'argile et concernaient des levés de propriétés foncières en vue du paiement des impôts. En 1930, on a trouvé près de Kirkouk en Irak une carte représentant une région avec ses montagnes, ses rivières et ses villages ainsi que des inscriptions explicatives dont les directions de l'Est et de l'Ouest. On conserve à Turin un papyrus polychrome datant de 1200 à 1100 avant J.-C. où le Nil est figuré ainsi qu'une route avec points d'eau et mines. Elle devait servir au transport des blocs de pierre. En Chine, des cartes régionales existaient au IIe siècle avant J.-C; elles étaient dessinées sur de la soie. Elles reposaient, depuis Chang-Hen (78 - 139), sur la détermination de coordonnées. La première carte d'ensemble de la Chine fut élaborée par Phei-Hsui en 267. Il manquait cependant à la cartographie chinoise le cadre théorique que les Grecs avaient su imaginer. Des cartes marines, composées d'un treillis de fibres de cannes, furent réalisées par les habitants de îles Marshall, dans le sud du Pacifique. Les civilisations mayas et incas connaissaient bien l'art de la cartographie.
L'une des premières cartes du monde aurait été réalisée par Anaximandre de Milet (Milet, c. 610 - c. 547 av. J.-C). Elle a disparu mais nous en avons une idée grâce à des commentaires d'Aristote (Stagirus, 384 - Chalcis, 322 av. J.-C). La Terre y était figurée comme un cercle divisé en un certain nombre de figures simples et toutes les terres connues alors y étaient représentées. Le centre était occupé par la mer Egée et la périphérie par l'océan. Cette représentation connaîtra un vif succès, mais elle fut cependant vite critiquée, en particulier par Hérodote (c. 484 - c. 420 av. J.-C).
Dicéarque de Messine (347 - 285 av. J.-C.) situe les points connus par rapport à deux axes passant par Rhodes: le diaphragme, orienté est-ouest, et la perpendiculaire.
La carte d'Ératosthène, aux environs de 200 ans avant J.-C, s'étend de Gibraltar à l'ouest jusqu'à l'embouchure du Gange à l'est et la Libye au sud. C'est la première carte où les latitudes sont figurées sous forme de lignes parallèles. Elle comporte également plusieurs méridiens, espacés irrégulièrement. Ce fut Hipparque qui, le premier, insista sur l'utilisation de l'astronomie pour la mesure des positions et systématisa la cartographie en imaginant des systèmes de projection. On le considère souvent comme l'inventeur de la trigonométrie. Il fut très critique sur l'œuvre d'Ératosthène et remplaça ses parallèles et ses méridiens qui passaient par des lieux connus par des droites équidistantes. En les numérotant, on pouvait repérer tout point à la surface de la Terre. Les Grecs essayèrent ainsi d'avoir une vision d'ensemble du monde connu comme dans la figure du globe de Cratès vers 150 av. J.-C. C'est grâce à Strabon (Amasée, Cappadoce, c. 64 av. J.-C. - c. 23 av. J.-C.) que nous connaissons les œuvre de ses prédécesseurs. Sa Géographie, composée de dix sept livres, est l'unique vestige de la cartographie antique qui nous soit parvenu. C'est par son intermédiaire que avons aujourd'hui connaissance des travaux d'Ératosthène. Strabon, qui était un grand voyageur, sut les améliorer et y intégrer les écrits, malheureusement disparus, conservés dans la bibliothèque d'Alexandrie.
Le premier à avoir été confronté au problème de la représentation plane de la Terre fut Claude Ptolémée dans son ouvrage La Géographie où il donne plusieurs cartes du monde plus ou moins détaillées. Pour les cartes à grande échelle, les méridiens et les parallèles sont des droites équidistantes se coupant à angle droit. Pour celles à petite échelle, il décrit deux possibilités de projection. D'abord, il utilise un cône de même axe que la Terre et qui la coupe au 63ème parallèle (celui où il plaçait la mythique Thulé) et à l'équateur. Les méridiens sont les génératrices du cône et les parallèles sont ses cercles de base, donc centrés au sommet du cône. Mais il n'est pas satisfait de cette représentation: les méridiens sont cassés au niveau de l'équateur et les longueurs ne sont pas respectées sur les parallèles. Il invente donc une projection conique arrondie. Seul le méridien central, celui de Rhodes et de Syène, est une droite. Les parallèles sont des arcs de cercles concentriques, dont les longueurs sont proportionnelles aux longueurs réelles et dont il faut déterminer les centres. Cette représentation conserve les rapports entre les aires. Bien entendu, à cause des erreurs de mesure et des simplifications apportées dans les calculs (p=3 par exemple), ses cartes n'étaient pas fidèles. Par exemple, l'Eurasie était beaucoup trop importante par rapport au reste du monde. Mais Ptolémée fut le premier à aborder scientifiquement la cartographie. Son œuvre est constituée de huit parties. La dernière contient des instructions pour établir des cartes. Les principaux lieux sont accompagnés de leurs coordonnées. Huit mille points proviennent d'itinéraires de voyage et trois cent cinquante sont déterminés astronomiquement. C'est grâce à ces coordonnées que le moine Nicolaus Germanus fut capable de refaire des cartes identiques au XVè siècle. Il les offrit en 1466 au Duc de Ferrara. En effet, les travaux de Ptolémée, ainsi que toutes les connaissances grecques, avaient disparu de l'Europe après la chute de l'Empire Romain. La Géographie ne fut redécouverte qu'à la fin du XIIè siècle par Maxime Planude (c. 1255 - c. 1305). Ptolémée ne fut traduit en latin qu'en 1405 par le savant byzantin Manuel Chrysoloras (c. 1355 - 15 avril 1415) qui l'offrit au Pape Alexandre V (1340 - 1410). La première version fut imprimée à Bologne en 1477. Ainsi, toutes les notions fondamentales de la cartographie avaient été établies par les Grecs.
Les préoccupations des Romains furent centrées sur les itinéraires terrestres. C'est le cas de la carte connue sous le nom de Table de Peutinger. Elle représente l'Empire Romain de la Grande-Bretagne jusqu'à l'embouchure du Gange. Il s'agit d'une copie médiévale, que certains historiens attribuent à un moine de Colmar qui l'aurait exécutée en 1265, d'un document antique dont l'original a peut-être été réalisé vers 365 par Castorius, géographe et philosophe romain. Elle se présente sous la forme d'un rouleau de 6,80 mètres de long et 34 cm de large et est composée de onze feuilles de parchemin collées ensemble. Malgré retirement des contours géographiques, qui en rend la lecture difficile, les itinéraires routiers sont schématiquement corrects. Chaque station est indiquée par un coude, et porte un chiffre donnant la longueur de l'étape (voir: www.fh-augsburg.de/%7Eharsch/Chronologia/Lspost03/Tabula/tab_pe00.html).
Cette carte avait été retrouvée à Worms en Allemagne à la fin du XVè siècle par Konrad Bickel, ou Celtes (1549 - 1508), bibliothécaire de l'Empereur Maximilien 1er d'Autriche. Il la légua par testament à Konrad Peutinger (Augsbourg, 14 octobre 1465 - Augsbourg, 28 décembre 1547), un humaniste, avec l'obligation de la publier. Mais celui-ci ne put mener le projet à bien. Plusieurs années après, l'un de ses parents éloignés, Marcus Welser (1558-1614), retrouve la carte et décide de la publier. Une édition partielle, à titre d'essai, Fragmenta Tabulae antiquae... paraît chez l'éditeur vénitien Alde Manuce en 1591. Puis Welser confie à Abraham Ortelius le soin de faire paraître la table dans sa totalité. Un dessin exécuté par Johannes Moller, qui réduit de moitié les dimensions de l'original, lui est remis. Mais la mort empêche Ortelius de terminer son travail. Son œuvre est poursuivie par l'imprimeur Johannes Moerentorf, latinisé en Moretus (1543 - 1610), gendre et successeur de Christophe Plantin (Saint-Avertin, 1519 ou 1520 - Anvers, 1589), et la première édition, tirée à deux cent cinquante exemplaires, est publiée à Anvers en 1598. De très nombreuses éditions suivront. La carte fut finalement achetée par le Prince Eugène de Savoie-Carignan (1663-1736) et elle entra dans les collections de la Bibliothèque de Vienne où elle se trouve toujours.
La cartographie européenne cessa pratiquement d'exister après la chute de l'Empire Romain en 476. Au Moyen Âge, on trouve des cartes dites en T.O. car le monde y est délimité par une mer circulaire en O où s'inscrit un T. La barre verticale du T représente la Méditerranée. Sa barre horizontale vers la gauche indique le Nord. La Mer Noire et le Don y sont figurés. La partie droite de la barre horizontale du T montre le Sud, c'est-à-dire le Nil. Ces cartes eurent un succès durable mais elles n'étaient pas d'une grande utilité pour s'orienter. On eut alors recours à des itinéraires, sortes de tables donnant la liste des villes à traverser et des obstacles à franchir (mers, fleuves, montagnes, etc.) pour aller d'un point à un autre, les distances ou les temps de parcours et les possibilités d'hébergement. Chaque ville était identifiée par un monument significatif. À cette époque, la cartographie était dominée par les idées religieuses qui, de nouveau, penchaient pour une terre plate circulaire. Ces idées connaîtront leur apogée avec les mappemondes, des cartes qui accordent la première importance à Jérusalem et à la Terre Sainte, destination des croisades. C'est le cas, par exemple, de la mappemonde d'Ebstorf qui date de 1239. Il s'agissait d'une peinture circulaire de trois mètres et demi de diamètre. Elle était composée de trente feuilles de parchemin et comptait jusqu'à seize nuances de couleurs. Elle fut détruite en 1943 lors du bombardement de Hanovre.
C'est aux navigateurs arabes que l'on doit le renouveau de la cartographie. Ils établirent des cartes marines très exactes. En 1154, le géographe Al-Idrisi (Ceuta, c. 1099 - Sicile, c. 1165) réalisa une carte du monde qui s'étendait de l'Europe occidentale à l'Inde et à la Chine et de la Scandinavie au Sahara. À partir du XIIIè siècle, les navigateurs dessinèrent des cartes précises de la Méditerranée.
Elles ne comportaient ni méridiens ni parallèles mais des lignes reliaient les ports importants, d'où leur nom de portulans. Les côtes y étaient représentées avec précision mais l'intérieur des terres souffrait d'un manque de détails. Le plus ancien atlas maritime qui nous est parvenu est dû au génois Pietro Vesconte; il date de 1313. Les plus illustres cartographes arabes sont postérieurs: Ibn Battuta (Tanger, 1304 - c. 1368) et Ibn Khaldoun (Tunis, 1332 - Le Caire, 1406) à l'époque où commençait déjà le déclin de l'Islam en Europe. L'Empire Byzantin s'achèvera par la chute de Constantinople en 1453.
En Europe, l'idée du globe terrestre réapparaît avec Roger Bacon (Ilchester, Somerset, 1214 - Oxford, juin 1282) et Albert le Grand (Lauingen, Souabe, c. 1200 - Cologne, 1280). Quelques moines reprennent le flambeau de la cartographie vers le XIVè siècle sans doute poussés par les voyages de Marco Polo (Venise, 1254 - Venise, 8 janvier 1324). Des cartographes travaillent à Gênes, Venise, Florence et en Sicile. Les Catalans de Barcelone et de Majorque s'occupent de l'Extrême-Orient, comme l'atlas de Cresques Abraham (1325 - 1387) qui date de 1375. On redécouvre l'oeuvre de Ptolémée qui est traduite en latin. Le Cardinal Pierre d'Ailly (Compiègne, 1350 - Avignon, 1420) en fit paraître un commentaire en 1410. L'imprimerie, développée en Chine, fut introduite en Europe vers 1450. Elle permit de multiplier les éditions. Les premières cartes imprimées, à partir de la fin du XVè siècle, furent celles de Ptolémée. L'un des premiers globes terrestres fut fabriqué par l'allemand Martin Behaim (Nuremberg, 6 octobre 1459 - Lisbonne, 29 juillet 1507) vers 1492. L'Europe et l'Asie n'y sont séparés que de 120 degrés comme sur la carte de Paolo dal Pozzo Toscanelli (Florence, 1397 - Florence, 10 mai 1482) de 1474 dont Christophe Colomb se servit lors de son premier voyage.
La renaissance de la cartographie européenne est due aux grandes découvertes. À la suite d'Henri le Navigateur (Porto, 1394 - Sagres, 1460), les Portugais commencent l'exploration de la planète. Ils cherchent une voie vers les Indes. Bartolomeu Diaz (Algarve, Portugal, c. 1450 - disparu au large du Cap de Bonne Espérance, 29 mai 1500) découvre le Cap de Bonne Espérance en 1487 et Vasco de Gama (Sines, c. 1460 - Cochin, Indes, 1524) le double dix ans plus tard. Christophe Colomb atteint l'Amérique en 1492.
Les terres nouvellement découvertes furent figurées, en 1500, sur la carte manuscrite de Juan de la Cosa (Santona, c. 1449 - Turbaco, 1510). En 1507, les chanoines Gauthier Lud et Martin Waldseemüller (près de Fribourg, c. 1475 - Saint-Dié, c. 1522) publient à Saint-Dié la première carte où les nouvelles terres découvertes par Christophe Colomb sont désignées sous le nom d'Amérique. L'Asie était également bien distinguée de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud. En 1525, Oronce Fine (Briançon, 20 décembre 1494 - Paris, 8 août 1555) fait paraître la première carte de France. Il s'agit de quatre feuilles gravées sur bois à une échelle de 1/2 000 000. En 1531, il produisit aussi une carte du monde. Il déterminait les longitudes à l'aide des éclipses de la Lune. Il faut aussi mentionner les cartes de l'allemand Sebastian Münster (Ingelheim, 20 janvier 1488 - Bâle, 26 mai 1522) dont la Cosmographia Universalis parut en 1544. Le Val de Loire était alors terre de séjour royal. C'est grâce à la présence de nombreux savants et d'un graveur hollandais dans cette région que Maurice Bouguereau, un éditeur de Tours, publie en 1594 un atlas assez précis pour l'époque.
Dès l'âge de dix-huit ans, Mercator avait été initié à la construction de globes par son maître Gemma Frisius, de l'Université de Louvain. En 1538, il dresse sa première carte du monde. En 1541, Charles Quint, lui commande un globe terrestre et un globe céleste. Il s'établit à Duisburg en 1552 et commence à travailler à son système de projection. Sa carte du monde fut terminée en 1569; elle comporte dix-huit feuillets. Après avoir publié en 1578 un ouvrage intitulé Tabulae geographicae Cl. Ptolemaei ad mentem auctoris restitutae et emendatae, il travaille à la fabrication de son atlas Sive cosmographicae meditationes de fabrica mundi et fabricati figura paru en 1585 et dont la version définitive fut complétée et publiée par ses deux fils en 1595, un an après sa mort.
En 1570, Abraham Ortelius (Anvers, 1527 - Anvers, 1598), un autre Flamand, publia son Theatrum orbis terrarum en cinquante trois planches comportant soixante-dix cartes, qui peut être considéré comme le premier atlas universel.
La précision des cartes ultérieures fut grandement améliorée par des mesures plus exactes des latitudes, des longitudes ainsi que celles concernant les dimensions et la forme de la Terre. Les premières cartes indiquant des déclinaisons magnétiques locales remontent à la première moitié du XVIIè siècle. Les courants marins apparaissent sur les cartes vers 1665. À partir de 1680, les Jésuites mènent à bien une grande opération de cartographie de la Chine.
Au XVIIIè siècle, les principes scientifiques de la cartographie étaient bien établis et les inexactitudes les plus importantes portaient sur les régions inexplorées du globe. En 1737, Christopher Packe (1686 - 1749) fait paraître la première carte géologique.
À la fin du XVIIIè siècle, plusieurs pays d'Europe entreprirent des levés topographiques détaillés de leurs territoires. Comme nous l'avons vu, Jean-Dominique Cassini I fut chargé par Louis XIV d'établir une carte de France. Elle ne fut achevée qu'en 1815. Mais les travaux géodésiques et topographiques ne sont pas tout; le cartographe doit également définir un symbolisme et nommer les lieux (la toponymie). Il faut ensuite éditer les cartes. À l'époque de Cassini de Thury, la France manque de graveurs. Il doit en former. Le recrutement des ingénieurs pose également problème. Le travail avance lentement et, en 1756, sept ans après le début des travaux, seules douze planches sur cent quatre vingt sont terminées. Faute d'argent, Louis XV annule sa mission. Cassini lance une souscription. Quand il meurt en 1784, le flambeau est repris par son fils mais les événements politiques interrompent l'entreprise alors qu'elle était presque achevée.
Un Institut Cartographique National vit le jour en Angleterre en 1791. La première carte climatologique sera établie par Heinrich Wilhelm Brandes (Groden près de Ritzbüttel, 27 juillet 1777 -17 mai 1834) en 1820. En 1825, le marin et hydrographe français Louis Isidore Duperrey (Paris, 22 octobre 1786 - Paris, 25 août 1865) et le mathématicien et physicien anglais Peter Barlow (Norwich, 15 octobre 1776 - Woolwich, 1er mars 1862) dressent une carte des lignes isogones de déclinaison magnétique.
La cartographie militaire fera des progrès considérables sous l'Empire. Napoléon confie à Louis Albert Guislain Bacler d'Albe (Saint-Pol-sur-Ternoise, 21 octobre 1761 - Sèvres, 12 septembre 1824), un peintre qu'il avait remarqué pendant la campagne d'Italie, la réalisation d'une carte de l'Europe. Il l'accompagnera sur tous les champs de batailles, partageant sa tente, établissant la marche des différentes unités, envoyant ses ingénieurs à l'avant-garde pour dessiner à vue. Il en résultera une carte en 420 feuillets au 1/100 000, d'une étonnante précision, établie entre 1809 et 1812. Malheureusement les coffres contenant ces cartes sombrèrent pendant le passage de la Bérézina du 26 au 29 novembre 1812. Le projet fut repris sous la Restauration et Louis XVIII créa une commission présidée par Laplace. La France fut divisée en grands quadrilatères séparés par des chaînes de triangles de premier ordre, puis d'ordre supérieur. Cette carte, dite d'État-Major, ne sera achevée que vers 1880. Elle nécessita des efforts immenses, surtout en montagne. Elle comprend 267 feuilles et est au 1/80000. Pour la première fois, les signes conventionnels y sont uniformisés. Dans les régions accidentées, le relief est indiqué par un système de hachures qui suivent les courbes de niveau. Mais, pour les travaux de génie civil (ponts, routes, canaux, voies ferrées), la précision d'un ou deux mètres donnée par cette carte n'était pas suffisante. Un nivellement plus précis était nécessaire. On s'aperçut d'une différence de niveau entre la Méditerranée et l'Atlantique. Certains calculs donnaient 1m67 et d'autres 70cm alors que le dénivelé réel est de l'ordre de 30cm. Après la déclaration de guerre en 1914, on s'aperçut que la projection de Bonne était inadéquate. En effet, c'était une projection équivalente, mais elle n'était pas conforme. Elle conservait les surfaces mais pas les angles. Or les artilleurs avaient besoin de tirer en repérant d'après le son la direction dans laquelle se trouvait l'ennemi. Le 18 juin 1915, le Service Géographique de l'Armée adopta donc la projection Lambert.
La cartographie marine rencontre des difficultés spécifiques et doit mettre en œuvre des techniques complexes de mesure astronomique des longitudes. À cause du déchiquetage des côtes, la triangulation est difficile à réaliser. Il est nécessaire de disposer de comparaisons extrêmement précises entre le temps local, déterminé par le passage dans le plan méridien d'une étoile ou du Soleil, et celui du méridien d'origine. Ces comparaisons ne purent être réalisées qu'après l'invention et la mise au point du chronomètre de marine par John Harrison entre 1735 et 1757. Les conditions de navigation en furent bouleversées et la France et la Grande-Bretagne se lancèrent alors dans de grandes expéditions comme celles du Capitaine James Cook (Marton, 27 octobre 1728 - Iles Sandwich, 1779) qui fut tué dans la baie de Kealakekua, aux Iles Sandwich (Hawaii) lors de sa troisième expédition, le tour du monde de Louis Antoine de Bougainville (Paris, 11 novembre 1729 - 31 août 1811) entre 1766 et 1769 et le voyage de Jean François de Galaup, Comte de La Pérouse (Albi, 23 août 1741 - disparu après mars 1788) entre 1785 et 1788. À la fin du XVIIIè siècle, seuls des blancs subsistaient autour des pôles et à l'intérieur des continents. Les voyages à caractère naturaliste allaient suivre dont celui d'Alexandre de Humboldt (Berlin, 4 septembre 1769 - Berlin, 6 mai 1859) et du botaniste français Aimé Bonpland (La Rochelle, 22 août 1773 - Santa Ana, Argentine, 4 mai 1858) qui dura de 1799 à 1804 et celui de Charles Darwin (Shrewsbury, Shropshire, 12 février 1809 - Down, Kent, 19 avril 1882) à bord du Beagle entre 1831 et 1836. Mais ceci est une autre histoire.
En 1837, alors qu'il commandait le Cabot entre Charleston en Caroline-du-Sud et Greenock en Ecosse, le capitaine de vaisseau américain Thomas Hubbard Sumner (Boston, 20 mars 1807 - Taunton, Massachussets, 9 mars 1876) avait calculé la position de son navire à partir de la longitude estimée et de l'observation d'une étoile. Il l'avait reportée sur sa carte. Mais, n'étant pas certain de sa mesure de longitude, il calcula à nouveau sa position en prenant une longitude plus faible puis une supérieure. Les trois points étaient alignés! Il refit les mêmes opérations avec une autre étoile et obtint, de nouveau, trois points alignés. Cette seconde ligne coupait la première et l'intersection indiquait la position exacte du navire. Il n'avait plus besoin d'une mesure exacte de la longitude. C'est la méthode des droites de hauteur. Elle fut améliorée en 1875 par le Capitaine de Frégate Adolphe Laurent Anatole Marcq de Blond de Saint-Hilaire (1832 - 1889) qui recouru à une simplification, la méthode du point approché, pour la déterminer puis, en 1883, par Philippe Eugène Hatt (17 juillet 1840 - 9 octobre 1915). Quelques variantes furent ensuite apportées par Louis Eugène Napoléon Favé (18 juillet 1853 - 30 juillet 1922), X 1873, le Lieutenant de Vaisseau Edouard Perrin et Auguste Claude. C'est la seule méthode astronomique utilisée jusqu'à nos jours. En 1891, le congrès international de géographie proposa de créer des cartes couvrant le monde entier à l'échelle de 1/1 000 000, travail qui n'est pas encore terminé. La première édition de la carte générale des océans, due au Prince Albert I de Monaco (Paris, 13 novembre 1848 - Paris, 26 juin 1922), paraît en 1904.
Au cours du XXè siècle, la cartographie bénéficia d'importantes innovations techniques. La photographie aérienne se développa pendant la première guerre mondiale. Puis ce furent les satellites artificiels à partir de 1966 avec le lancement du satellite Pageos. Puis, dans les années 1970 avec les trois satellites Landsat, les États-Unis entreprirent un levé géodésique complet de la Terre. La France, à partir de 1986, lança les satellites SPOT qui permettent de distinguer des détails de 10 m. Malgré ces immenses progrès, des parties importantes de la surface de la Terre n'ont pas encore fait l'objet d'un relevé précis.
Jusque vers 1985, les rôles des divers spécialistes de géodésie, de topographie et de cartographie étaient clairement identifiés. Les géodésiens effectuaient les observations détaillées et les calculs qui définissaient la forme fondamentale de la Terre et celles des pays. À partir de ces informations, les topographes mesuraient les détails au sol ou des photogrammètres analysaient des photographies aériennes. Ces mesures permettaient aux cartographes d'établir des cartes alliant une grande élégance graphique à une présentation efficace. Chacun trouvait ensuite lui-même dans la carte ce qu'il cherchait.
L'essor de l'informatique a complètement bouleversé cet ordonnancement. Les premiers travaux semblent être dus à des météorologistes et des biologistes du sud de l'Angleterre. Mais les avancées majeures furent effectuées par des équipes de recherche, l'une britannique, l'Expérimental Cartography Unit, entre 1968 et 1973, l'autre de l'Université de Harvard à peu près à la même époque.
L'ordinateur ne sert plus simplement à tracer des cartes, mais il sert aussi à vérifier la qualité des données, à éliminer automatiquement les distorsions dans les photographies aériennes et satellitaires, à rechercher les informations intéressantes et à présenter les résultats de la manière choisie par l'utilisateur.
Une grande partie du travail hautement qualifié est maintenant réalisé par les satellites du Global Positioning System (GPS) et les nouveaux appareils de prospection. Un nouvel outil, le Système d'Information Géographique (SIG), a vu le jour. Le premier SIG fut créé au Canada en 1965 à l'occasion d'un inventaire de la faune et de la flore du pays tout entier. Il en existe maintenant des dizaines de milliers dans le monde et leur nombre s'accroît d'environ 20 % par an. De nombreuses entreprises créent des logiciels et les adaptent aux besoins des clients. Les SIG peuvent accomplir des tâches aussi diverses que la commercialisation d'un produit vers un public ciblé, l'archivage de la description de tous les câbles électriques d'un pays, l'enregistrement de toutes les transactions foncières ou la modélisation du réchauffement planétaire. Ce sont les seuls outils qui peuvent intégrer des informations provenant de sources très différentes et les traiter dans le sens voulu par l'utilisateur.
Je tiens à remercier Dominique Tournés qui m'a encouragé dans ce travail et m'a signalé certaines références fondamentales. Je suis redevable à Monsieur Jean-Paul Devilliers de nombreuses remarques constructives; je lui en suis reconnaissant.
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[22] P. Tardi, L'œuvre de l'Académie des Sciences dans la détermination de la forme et des dimensions de la Terre, dans Troisième Centenaire de l'Académie des Sciences, Gauthier-Villars, Paris, 1967, Tome 1, pp. 307-330.
[23] J. Le Rond d'Alembert, Recherches sur différents points importants du système du monde, 1754.
[24] F. Arago, Histoire de ma jeunesse, 1985.
[25] R. Bourgeois, Cours de géodésie et d'astronomie, 1909-1929.
[26] C.-F. Cassini de Thury, Élémens d'astronomie, 1740.
[27] C.-F. Cassini de Thury, La méridienne de l'Observatoire royal de Paris, vérifiée dans toute l'étendue du royaume, 1744.
[28] C.-F. Cassini de Thury, Addition aux tables astronomiques de Cassini, 1756.
[29] C.-F. Cassini de Thury, Description géométrique de la France, 1783.
[30] C.-F. Cassini de Thury, Carte de France, divisée en XXXI gouvernements militaires et en ses provinces..., 1786.
[31] J. Cassini, Suite des mémoires de l'Académie royale des sciences, année 1718 : de la grandeur et de la figure de la Terre, Paris, Imprimerie royale, 1720.
[32] J.-D. Cassini, Recueil d'observations faites en plusieurs voyages par ordre de sa Majesté pour perfectionner l'astronomie et la géographie, Paris, Imprimerie royale, 1693.
[33] A.L. Cholesky, Rapport sur les opérations du nivellement de précision d'Algérie et de Tunisie pendant les campagnes 1910-1911, 1911-1912, 1912-1913, Paris, Imprimerie du Service géographique de l'armée, 1913.
[34] A.-C. Clairaut, Théorie de la figure de la Terre, tirée des principes de l'hydrostatique, 1743.
[35] J.B.J. Delambre, Méthodes analytiques pour la détermination d'un arc du méridien..., 1798.
[36] J.B.J. Delambre, P. Méchain, Bases du système métrique décimal, ou mesure de l'arc du méridien compris entre les parallèles du Dunkerque et de Barcelone, Paris, Baudouin et Garnery, 1806-1810.
[37] G. Frisius, Principiis astronomiae et cosmographiae, deque usu globi, ab eodem editi. Item de orbis divisione et insulis rebusque nuper inuentis. Ejusdem libellus de locorum describendorum ratione et de eorum distantiis inueniendis, nunquam antehac visus, Paris, apud Thomam Richardum, 1547, (Recueil factice).
[38] C.F. Gauss, Méthode des moindres carrés, mémoires sur la combinaison des observations, 1855.
[39] P. Helbronner, Description géométrique détaillée des Alpes françaises, 1910.
[40] P. de La Hire, L'école des arpenteurs, où l'on enseigne toutes les pratiques de géométrie..., 1692.
[41] C. Lallemand, Notice sur le nivellement des vallées des Alpes et sur le relevé et la publication des profils..., 1911.
[42] C. Lallemand, Rapport général sur les travaux du nivellement général de la France de 1909 à 1912 inclus..., 1914.
[43] C. Lallemand, Nivellement des vallées des Alpes et relevé des profils en long des cours d'eau : notice..., 1916.
[44] P.-S. de Laplace, Traité de mécanique céleste, 1825.
[45] A. Laussédat, Cours d'astronomie et de géodésie 2e division, 1858-1865.
[46] A. Laussédat, Recherches sur les instruments, les méthodes et le dessin topographique, 1898.
[47] A.M. Legendre, Nouvelle théorie des parallèles avec un appendice contenant la manière de perfectionner la théorie..., 1803.
[48] G.F. Maraldi, Nouvelle carte, qui comprend les principaux triangles qui servent de fondement à la description..., 1744.
[49] G. Mercator, Atlas, sive cosmographicae meditationes defabrica mundi etfabricatifugura, Editio décima, Amsterodami, typis Henrici Hondii, 1628. [50] S. Munster, La cosmographie universelle, contenant de toutes les parties du monde, avec leurs propriétez et appartenances, S.I., s.n., 1552.
[51] I. Newton, Principes mathématiques de la philosophie naturelle, 1759.
[52] H. Noirel, La topographie moderne et les applications de la photographie aux levés topographiques..., 1921.
[53] A. Ortelius, Thesaurus geographicus recognitus et auctus, Antverpiae, ex officina Plantiniana, 1596.
[54] G. Perrier, Cours de géodésie et d'astronomie, 1929-1930.
[55] C. Ptolémée, Geographicae, libri octo ; graeco-latini, recogniti et emendati, cum tabulis geographicis ad mentem auctoris restitutis per Gerardum Mercatorem, Amsterodammi, sumptibus Cornelii Nicolai et Judoci Hondii, 1605.
[56] C. Ptolémée, Geographicae enarrationis libri octo,... Annotationes Joannis de Regiomonte in errores commissos a Jacobo Angelo in translatione sua, Argentorati, s.n. 1525.
[57] C. Ptolémée, Claudii Ptolemaei...Omnia, quae exstant, Opera, geographia excepta [cura H. Gemusaei, cum Ptolemaei vita, L. Gaurico auctore]... Almagesti, seu Magnae compositionis mathematicae opus..., Basilae, apud Henricum Petrum, 1541.
[58] C. Ptolémée, Composition mathématique de Claude Ptolémé [ou astronomie ancienne], traduite pour la première fois du grec en français sur les manuscrits originaux de la bibliothèque du Roi par M. Halma, et suivie des notes de M. Delambre,..., Paris, Impr. de J.-M. Eberhart, 1816.
[59] L. Puissant, Traité de géodésie, ou exposition des méthodes astronomiques et trigonométriques applicables, 1805.
[60] G.B. Riccioli, Astronomiae reformatae tomi duo, Bologne, Victor Benatius fils, 1665.
[61] W. Snel Van Royen (Snellius), Willebrordi Snelli R.F. resuscitata geometria, Lugodini, ex officina Plantiniana Raphelengii, impensis Hennanni Mulleri, 1607.
Mis sur le web en octobre 2007, par R. Mahl. Quelques photographies et références hypertexte ont été ajoutées au texte de la publication initiale du bulletin de la SABIX.