La promotion 1903 à travers les lettres de Marcel Charruau

Faire un bulletin sur l’ensemble d’une promotion, c’est un défi ! La SABIX ne l’avait encore jamais tenté. Un tel projet revient à s’intéresser à une promotion complète depuis son incorporation jusqu’au décès de ses derniers membres… Cela suppose donc de collecter témoignages et documents sur un demi-siècle, certes sans approfondir chaque cas mais en évitant avec soin d’omettre aucun des caractères les plus saillants de cette promotion. Cette idée n’est pas née d’un intérêt particulier pour la 1903, la 110^ème promotion passée par l’Ecole, mais très prosaïquement d’opportunités documentaires convergentes et aussi inattendues qu’exceptionnelles.

En premier lieu l’apparition imprévue au grand jour des lettres que le camarade Marcel Charruau (X 1903) écrivait à sa mère déjà veuve : une lettre par semaine, 188 lettres pendant cinq années de préparation et d’Ecole. Ses descendants avaient conservé ces précieuses archives, son petit-fils Jérôme Charruau a décidé de les faire éditer et s’est tourné vers la SABIX, qui a réalisé cette édition en parallèle de la publication de ce bulletin. Il n’existe pas, pour cette époque, d’autre correspondance polytechnicienne connue de cette qualité et couvrant l’ensemble de la scolarité. C’est dire tout l’intérêt de ces documents.

A ces lettres qui racontent au jour le jour la vie polytechnicienne, se sont ajoutées trois collections de photos albuminées de couleur sépia consacrées à cette même promotion. Elles illustrent les événements marquant la vie des élèves : le traditionnel bizutage, la campagne de Kès, la séance des ombres, les entrainements militaires à Fontainebleau. Cinquante photos conservées par Marcel Charruau constitue la première collection, un album de 120 clichés trouvés par hasard dans un salon du « vieux papier » dans les années 2000 forme la seconde et la dernière, une collection d’une cinquantaine de photos entrée par don dans les archives de l’Ecole en 1994. De nombreuses photos sont communes à ces trois collections, ce qui montre qu’à l’époque on tirait les épreuves à un grand nombre d’exemplaires. Car, si plusieurs clichés identiques sont arrivées jusqu’à nous par trois camarades différents, il est probable que beaucoup d’autres en gardaient en souvenir. On pouvait les conserver dans des albums avec des pages encochées. Ces photos prises sur le vif, en général sans pose, sont très différentes des photos statiques, tels que les albums de promotion également conservées[1] et qui, s’ils constituent des souvenirs officiels et normés, complètent avantageusement les documents précédents.

Que pouvait-on espérer de plus pour découvrir une « antique » promotion ? Mais cette promotion 1903, choisie quasiment par hasard se distingue-t-elle des autres ? Louis Armand disait : « De même que chacun d’entre nous est ce qu’il est, grâce aux oligo-éléments dont son organisme a besoin, de même chaque promotion possède une personnalité en grande partie due à ces sujets d’exception dont l’influence, si peu nombreux qu’ils soient, est profonde sur leurs condisciples[2].» A défaut d’avoir  identifié les figures les plus marquantes de cette promotion, qui ne nous a pas semblée bien différente des autres de son époque, nous nous sommes efforcés de retracer la plupart des carrières individuelles de ses membres.

[1] Le Service Historique de la Défense (SHD) conserve ces albums sous forme numérique

[2] Louis Armand (X 1924), in préface de l’Histoire de l’Ecole polytechnique, de Jean-Pierre Callot, 1975